C’est en 2013 que Mia Goth affole le Tout-Hollywood. À seulement 19 ans, elle obtient son premier grand rôle dans un drame controversé – Nymphomaniac Vol. II –, dirigée par un réalisateur légendaire (Lars Von Trier) aux côtés de stars mondiales. Son rôle ? Simuler beaucoup de rapports sexuels, intimider et dominer des hommes mûrs – parfois avec une arme à feu – puis souiller Charlotte Gainsbourg. Si sa bouche en cœur rappelle celle d’Adèle Exarchopoulos – née la même année qu'elle – Mia Goth partage aussi avec cette dernière une audace certaine dans le choix de ses premières apparitions. Avec le personnage de P, la protégée de Jo (Charlotte Gainsbourg) dont elle est tout à tour l’objet sexuel, la confidente et la maîtresse, Mia Goth s’est imposée comme une actrice unique en son genre : son visage frais et innocent lui donne des airs de poupée, sans pour autant effacer cette part mystérieuse et provocatrice qui peut la rendre si inquiétante…
Une séduisante désinvolture
Inutile de la chercher sur les réseaux sociaux, Mia Goth fuit les selfies et dénonce le culte de l’autopromo. À 24 ans, cette attitude la distingue des actrices montantes de sa génération et la rend encore plus intrigante. Pourtant, des photos d’elles, Mia en a plein. D’abord, parce qu’elle a commencé sa carrière dans le mannequinat, peu de temps avant sa rencontre avec Shia Labeouf, son partenaire à l’écran dans Nymphomaniac – omniprésent sur la Toile – à qui elle a dit “yes” à Las Vegas en octobre 2016. Dès lors, ses moindres mouvements sont capturés par une horde de paparazzis, jusqu’au divorce, deux ans plus tard. Et dans les pages des tabloïds, Mia fait la gueule. Lorsqu’elle prend la pose pour Miu Miu, en 2015, elle affiche sa moue boudeuse avec une candeur désarmante. Une campagne de pub qui sera d’ailleurs censurée au Royaume-Uni, jugée scandaleuse parce qu'elle montre une enfant déguisée en femme adulte dans une pose sexuellement suggestive… alors qu'elle a 22 ans. Mais en réalité, Mia n’a rien de l’adolescente renfrognée dont l'image lui colle à la peau. Elle se définit plutôt comme une “grand-mère”, préférant les vraies discussions en tête à tête “aux vulgaires selfies”, confiait-elle à i-D en 2016. Une grand-mère intrépide, somme toute.
Enfant sauvage
C’est justement sa grand-mère, une grande actrice brésilienne (Maria Gladys), qui lui donne le goût du cinéma. Élevée dans une famille à l’esprit nomade, Mia Mello Gypsy Da Silva Goth grandit entre le Canada (avec son père) et Rio (avec sa mère), avant de poser ses valises à Londres, sa ville natale. Si elle comptait s’orienter vers une école de théâtre, c’était avant de rencontrer Charlotte Gainsbourg, qu’elle considère comme “la meilleure prof”. Prête à tout pour incarner ses personnages de façon convaincante, Mia Goth va jusqu’à dormir dans la rue, ne pas se laver pendant 5 semaines et s’astreindre à un régime de 900 calories par jour pour incarner Mijla dans The Survivalist, le thriller apocalyptique de Stephen Fingleton où elle vit dans une cabane en pleine forêt. Si elle protège jalousement sa vie privée, Mia Goth est d’une grande générosité avec les réalisateurs. C’est à travers des personnages dramatiques qui doivent lutter ou se battre qu’elle s’affirme, plutôt que de se complaire dans des rôles confortables qui pourraient lui rapporter autant.
Un goût prononcé pour l’étrange
“The darker, the better”, confiait-elle à I-D en 2016. Une force obscure guide les choix Mia Goth, qui, en 2017, incarne Hannah, une étrange patiente enfermée dans un institut suisse où sévit un sinistre corps médical dans A Cure of Wellness. Une performance sublime qui n’a pas manqué de troubler le réalisateur – Gore Verbinski (Le Cercle) – qui en venait à oublier de couper la caméra au moment de changer de scène. Si elle embrasse avec une telle passion ses personnages, c’est sans doute parce que Mia Goth a quelque chose de mystique. Celle qui confie volontiers son aversion pour le surnaturel touche aujourd’hui les étoiles, en jouant dans l’horrifique Suspiria de Luca Guadagnino, aux côtés de Tilda Swinton et Dakota Johnson. C’est ainsi que l’exigeante Mia Goth ne cesse d’enrichir sa carrière de pierres précieuses, en figurant exclusivement dans des pépites du cinéma indépendant. Elle sera finalement à l’affiche de l’anxiogène High Life, le nouveau film de Claire Denis prévu pour novembre, où elle incarne une astronaute, forcément bizarre.