Roschdy Zem fait ses débuts d’acteur dans le cinéma d’auteur avec André Téchiné. Une arrivée par la grande porte. Ensemble, les deux hommes feront trois films : J’embrasse pas en 1991, Ma saison préférée en 1993 et Alice et Martin en 1998. En même temps qu’elle pose les bases de la carrière de l’acteur, cette collaboration fructueuse en révèle les caractéristiques : qu’il soit au premier plan ou non, Roschdy Zem fascine par sa présence tranquille, souvent impénétrable. Chez lui, le corps est le meilleur vecteur d’émotions.
Son jeu subtil lui vaudra d’incarner de nombreux personnages mutiques, écorchés par la vie (Le Cœur fantôme (1996) de Philippe Garrel), silencieux et minimalistes (Ceux qui m’aiment prendront le train (1998) de Patrice Chéreau). Souvent flic ou canaille, Roschdy Zem navigue aussi bien dans les polars (Mains armées (2012) de Pierre Jolivet) que dans les comédies romantiques (On a failli être amies (2014) d'Anne Ly). Également comédien de théâtre, Roschdy Zem revêt aussi la casquette de réalisateur, avec notamment Omar m’a tuer, sorti en 2011.
Roschdy Zem, un acteur caméléon à l'affiche du film Vivants
À partir du mercredi 14 février 2024, Roschdy Zem, 58 ans, est à l'affiche du nouveau film de la réalisatrice Alix Delaporte, aux côtés notamment de la comédienne Alice Isaaz et de Vincent Elbaz. L'acteur y incarne un grand reporter et rédacteur en chef passionné et engagé. Retour sur 5 de ses rôles les plus mémorables.
1. Roschdy Zem en toxicomane dans N’oublie pas que tu vas mourir (1995) de Xavier Beauvois
Sixième film de Xavier Beauvois, N’oublie pas que tu vas mourir est le long-métrage qui propulse Roschdy Zem sur le devant de la scène. Aux côtés de Chiara Mastroianni, Bulle Ogier, Jean Douchet et Emmanuel Saliger, l’acteur y incarne Omar, un toxicomane à la dérive qui entraîne avec lui Benoît, jeune militaire réformé et séropositif. Ici plus que tout ailleurs, Roschdy Zem montre l’étendue de sa palette de jeu avec une force rare.
Il faut le voir expliquer, au bord de l’évanouissement, la meilleure manière de se faire un shoot d’héroïne. Une performance incroyable qui prouve que l’acteur sait parfaitement incarner des rôles antinomiques au cinéma.
2. Roschdy Zem en immigré algérien dans Vivre au Paradis (1998) de Bourlem Guerdou
Alors qu’il a souvent incarné des personnages d'immigrés, du fait de ses origines marocaines, l’acteur réfuse souvent le rôle d’étranger que l’on cherche trop souvent à lui accoler. Pour ce film, l’acteur a d’ailleurs dû réapprendre à parler une langue maternelle lointaine, devenue étrangère pour lui, enfant de la deuxième génération d'immigrés. Mais Vivre au Paradis renoue quelque peu avec l’histoire familiale de l’acteur, puisqu’il met en scène l’arrivée d’un homme algérien en France.
Pour incarner Lakhdar, Roschdy Zem a confié dans un entretien pour Libération à l’occasion de la sortie du film s’être inspiré de son père. Naviguant subtilement entre manipulation et rêves déchus, l’acteur porte ce drame essentiel à bout de bras, en faisant la lumière sur le passé encore tabou de la France.
La bande-annonce du film Les Petits Souliers (1999) d'Olivier Nakache et Eric Toledano.
3. Roschdy Zem en père-noël improvisé dans Les petits souliers (1999) d’Olivier Nakache et Eric Toledano
Après avoir fait ses preuves chez André Téchiné, Leatitia Masson et Patrice Chéreau, Roschdy Zem s’illustre dans le genre de la comédie dramatique avec ce court-métrage, deuxième film du célèbre duo à l’origine d’Intouchables (2011). Disponible sur YouTube, Les Petits Souliers s’inscrit dans la veine de l’équipe du Splendid et rappelle inévitablement Le Père Noël est une ordure (1982), de Jean-Marie Poiré.
Ici, Roschdy Zem, Jamel Debbouze, Gad Elmaleh et Atmen Kelif revêtent les barbes blanches de pères noëls de fortune pour aller surprendre les enfants de riches familles le soir du réveillon. Sur fond de lutte des classes et de dénonciation du racisme, le film montre l’acteur dans toute son humilité. Dans ce petit rôle, il parvient non seulement à hypnotiser le regard, mais aussi à valoriser ses partenaires de jeu, en n’en faisant jamais trop.
4. Roschdy Zem en mari échangiste dans Happy Few (2010) d’Antony Cordier
Flic, malfrat, délinquant… Tous ces personnages que Roschdy Zem a régulièrement joué au cours de sa carrière ne pourraient pas être plus à l’opposé du film d’Antony Cordier. Ici, l’acteur incarne Franck, un homme marié à Rachel (Marina Foïs). Ensemble, le couple fait la connaissance de Terry (Elodie Bouchez) et Vincent (Nicolas Duvauchelle), avec qui ils vont avoir une histoire amoureuse.
Assez novateur pour l’époque, le film s’attelle avec douceur à une relation échangiste inhabituelle, remplie de tendresse et d'un naturel fulgurant. L’occasion de voir Roschdy Zem en masseur sublime se rouler dans la farine, jouer au squash ou faire la cuisine. A travers la simplicité et l’évidence des relations montrées à l’écran, Antony Cordier fait ici l’éloge d’un amour peu conventionnel, incarné à merveille par un quatuor très charismatique.
5. Roschdy Zem en commissaire grave dans Roubaix, une lumière (2019) d’Arnaud Desplechin
Dans le dernier film d’Arnaud Desplechin, Roschdy Zem est au sommet de sa gloire. Son rôle de commissaire intransigeant à la tête d’une enquête sur l’assassinat d’une vieille dame – histoire vraie qui avait fait les gros titres à Roubaix à l’époque –, aura valu au comédien de remporter le César du meilleur acteur cette année. Élevé au statut d’être moral suprême, Roschdy Zem est la véritable lumière du film, sensée éclairer tous les autres personnages minés par la misère sociale.
Le jeu irréprochable de l’acteur réhabilite le rôle du policier qui lui a si longtemps collé à la peau, dépassant ici toutes les autres interprétations qu’il a pu faire. Aux côtés de Léa Seydoux, Sara Forestier et Antoine Reinartz, Roschdy Zem brille tout particulièrement, agissant comme l’agent médiateur détenteur du bien.
Vivants (2024) d'Alix Delaporte, avec Roschdy Zem, Alice Isaaz, Vincent Elbaz et Pascale Arbillot, au cinéma le 14 février 2024.