Le défilé Maison Margiela printemps-été 2024 : une réflexion sur les classes et les genres
Tels des chapitres, les collections dévoilées par Maison Margiela ces dernières années semblent écrire saison après saison un conte de la fin du 19e siècle. Pour le défilé Co-Ed printemps-été 2024, la maison française imagine la romance adolescente d'un homme et une femme de deux milieux antagonistes, l'aristocratie pour l’un et la classe ouvrière pour l’autre. Présentée dans le décor miroitant et immaculé du siège de la maison, avec casting cinq étoiles composé de Mariacarla Boscono et Julia Nobis, la collection joue sur la dualité entre leurs deux vestiaires : d’un côté, l’élégance masculine du dandy “comte” de la Belle Époque subtilement subvertie par les jeux de structures et de volume, de l’autre, la rencontre des dessous et dessus dans un vestiaire féminin légèrement provocateur, où la déconstruction de la silhouette participe d'une réappropriation des codes de la bourgeoisie. Jusqu'à la fusion des deux dans des ensembles mixtes et androgynes, dont l'ambiguïté trouve son écho dans les paroles du titre MASCULINITY de Lucky Love, diffusé en fond sonore : “Do I walk like a boy / Do I speak like a boy / Do I stand like a boy.”
La quintessence du style John Galliano pour Maison Margiela
Déclinée dans des tonalités neutres, du gris foncé au rose poudré en passant par le beige clair, et jouant sur les contrastes entre les laines chaudes et épaisses très hivernales et des tulles, organzas et cotons translucides très légers, la collection Co-Ed printemps-été 2024 signe la quintessence du style John Galliano pour Maison Margiela. Jouant sur la superposition d’éléments, l’asymétrie et la déconstruction, les looks rappellent le style punk et baroque qui avait caractérisé son passage Dior, pendant que les impressionnants manteaux amples, les robes bustiers, drapés et nœuds XXL rendent un discret hommage aux grandes figures de la haute couture française, de Jacques Fath à Cristóbal Balenciaga. Sans pour autant oublier les éléments clés institués par Martin Margiela, des traits de coupe et fils de bâti visibles le long des jupes au fameux logo à quatre fils blancs, visible sur les gants en cuir comme sur les montures des lunettes.
Les pièces phares du défilé Maison Margiela Co-Ed printemps-été 2024
Les cols de chemise amovibles
Déjà aperçus lors des saisons précédentes, les cols de chemise amovibles s’illustrent comme un accessoire phare de cette nouvelle collection, que le vinyle blanc ou le coton rigide semblent figer dans un mouvement permanent.
Les shorts bouffants XXL
Pour livrer sa nouvelle vision du costume masculin, John Galliano imagine des shorts larges et bouffants aux airs de jupes, qui rappellent les hauts-de-chausses médiévaux. À leur volume accentué par de nombreux plis et l’épaisseur de la matière répondent des blazers aux épaules, à la taille et aux hanches marquées.
Les vêtements plastifiés
En clin d'œil au collections Margiela des années 90, la maison insère dans les silhouettes de nombreuses pièces enduites à l'effet craquelé – gants, robes et bustiers – dont la brillance contraste avec l’opacité des autres matériaux.
Le vichy à pois
Déjà décliné précédemment par le studio, le motif à pois vient ici perforer des jupes, des gants et des sacs en fusionnant avec un vichy noir et blanc qui provoque une véritable vibration visuelle. Jusqu’à envahir un manteau gris tout entier.
Les tabis derbys
Icône de Maison Margiela, la fameuse chaussure tabi se transforme une fois de plus cette saison. On la découvre ici à plat ou à talons dans des derbys à boucles ou lacets, ouvertes pour laisser apparaître les pieds.