En mars dernier, Sterling Ruby confiait déjà : “L’invitation spéciale de Pitti m’offre l’occasion idéale de concrétiser un projet que j’explore en privé dans mon atelier depuis près de dix ans”. C’est au Pagliere, un bâtiment proche de Florence, utilisé pour le stockage de foins pour chevaux depuis le XIXème siècle, que son défilé s’est déroulé sans encombre. Warehouse façon vieux bâtiment italien, baigné dans une fumée artificielle, les silhouettes atypiques de Sterling Ruby avançent dans une ambiance presqu’étouffante.
Soies javelisées, denims mordus par l’acide, travail de patchworks cinglants… Les tenues chez Sterling Ruby héritent de sa pratique artistique. L’artiste connu pour son oeuvre protéiforme, mêlant peinture, drapeaux, collage, sculpture, vidéo n’a de cesse de revisiter l’iconographie d’une Amérique profonde, celle des Amish et de la communauté Mennonite (communauté de chrétiens évangéliques anabaptistes des États-Unis et des Pays-Bas). Il redécoupe, grossit, ajoute ou soustrait des éléments à ses coupes pour les revisiter et les détourner de leurs auras premières. Dès les premiers looks du défilé, on découvrait alors des combinaisons d’ouvriers – que Sterling Ruby a l’habitude de concevoir pour son atelier – des kimono façon boro (terme japonais désignant “lambeaux déchirés” ou “haillons”) ou encore des longues robes bon-enfants en tartan aux couleurs fluo.
Dans son interview pour Numero en 2015, l’artiste explique la longue relation qu’il entretient avec la mode : “Quand j’avais 13 ans, ma mère m’a donné une machine à coudre. J’étais content d’être autonome, de pouvoir fabriquer mes propres affaires. À l’époque, les tenues que je faisais n’étaient pas du tout “couture”. Elles avaient un aspect brut, voire punk.” Dès les premiers looks du défilé, les termes bruts et punks ne peuvent que revenir pour caractériser ses combinaisons d’ouvriers – que Sterling Ruby a l’habitude de concevoir pour son atelier –, ses kimono façon boro (terme japonais désignant “lambeaux déchirés” ou “haillons”) ou encore ses longues robes en tartan bon-enfant couleurs fluo tranchantes.
Sterling Ruby, DEEP FLAG (5532) (detail), 2015, toile délavée et elastique, 443.2 × 802.6 cm. © Sterling Ruby. Photo by Robert Wedemeyer
Look 2 du défilé “S.R. STUDIO LA. CA.” par Sterling Ruby, le 13 juin durant le Pitti Uomo, Florence.
Par le passé, on connaissait déjà les interventions de Sterling Ruby dans le monde de la mode. Notamment avec le designer belge Raf Simons, son grand ami. Pour la collection haute couture de Dior automne-hiver 2012-2013, Raf Simons intégrait à ses painting dresses les œuvres de Sterling Ruby, précédées de celles de Gerhard Richter. L’année qui suivait, après le départ de Raf Simons de la maison de couture, Sterling Ruby réinjectait son esprit dans les pièces en jean du créateur sous son label éponyme. Suivi aussi de lorsque l’artiste avait conçu l’intérieur des showrooms new-yorkais et parisien de Calvin Klein… Soit, cela fait un certain temps que le nom de ”Sterling Ruby” est sur toutes les lèvres. L’artiste prend alors avec ce défilé une place qui l’attendait depuis longtemps.
Disponible exclusivement sur srstudio.com et ssense.com.
Look 4 du défilé “S.R. STUDIO LA. CA.” par Sterling Ruby, le 13 juin durant le Pitti Uomo, Florence.
Sterling Ruby, SAR-I SANG (2015), acrylique, élastique, tissu et carton sur toile, 182,9 x 182,9 x 5,1 cm.