Entre les comédies générationnelles qui le font connaître dans les années 2000, quelques blockbusters (War Dogs, 21 Jump Street), et plusieurs escales dans des projets indépendants, l’acteur Jonah Hill a maintes fois prouvé que son pouvoir comique n’a d’égal que sa profonde justesse dramatique. S’il maîtrise comme personne l’art du second rôle, pour lequel il frôle l’obtention d’un Oscar avec Le Loup de Wall Street (2013) de Martin Scorsese, il s’illustre aussi avec brio dans des leads partagés, comme dans la récente minisérie Maniac (2018). L’acteur, qui se fait ces temps-ci plus rare à l’écran, avait ravi la critique en 2018 avec 90’s, son excellent premier film en tant que réalisateur, un drame semi-autobiographique sur fond de culture skate qui fait honneur au premier du genre, Paranoid Park (2007) du cinéaste Gus Van Sant. Jonah Hill collabore d’ailleurs avec le réalisateur pour le drame Don’t Worry, He Won’t Get Far on Foot (2018), où il seconde brillamment Joaquin Phoenix. C’est avec le soutien de ce dernier à la production que Jonah Hill prépare son prochain film, dont le tournage vient d’être annoncé, un documentaire sur son propre psychothérapeute. Un projet inattendu qui donne l’occasion de revenir sur les performances de Jonah Hill les plus borderline…
Bande-annonce – "SuperGrave" (2007) de Greg Mottola
1. Jonah Hill dans le rôle d'un ado obsédé par le “fuck”
La fin du lycée, une dernière soirée avant les vacances, et deux adolescents qui comptent bien y perdre leur virginité, à condition de pouvoir trouver de l’alcool… SuperGrave de Greg Mottola est sûrement l’un des meilleurs exemples du genre buddy movie. Mais c’est aussi le film qui révèlera Jonah Hill et son talent comique. En tandem avec Michael Sera (Evan), le comédien y incarne Seth, un fauteur de trouble plein de ressources, mais impopulaire et malchanceux. Il réussira tout de même à donner la réplique à une jeune Emma Stone, légèrement manipulatrice sur les bords, et se liera d’amitié avec le producteur Judd Apatow (Freaks & Geeks, 40 ans, toujours puceau…) auquel il restera fidèle à travers les années. Immense succès public et critique, SuperGrave initiera aussi la réputation de Jonah Hill comme acteur le plus grossier d’Hollywood, avec le mot “fuck” prononcé à 84 reprises.
Bande-annonce - “Cyrus” (2010) de Jay et Mark Duplass
2. Jonah Hill dans le rôle d'un fils terriblement possessif dans Cyrus (2010) de
Mixer le comique d’un geek sans avenir avec l’horreur traditionnelle de Psychose, c’est tout le projet de Jonah Hill dans Cyrus. Dans cette comédie indépendante des frères Jay et Mark Duplass, Jonah Hill propose pour le rôle-titre une nouvelle itération de l’ado paumé qui avait lancée sa carrière, cette fois-ci, avec quelques années de plus au compteur. Cyrus, 21 ans, vit encore chez sa mère Molly (Marisa Tomei), où il s’adonne à tous ses hobbies fantasques de grand enfant parasite : compositeur amateur d’électro naze dans son home studio sur mesure, photographe du dimanche à ses heures perdues… De quoi provoquer quelques rires attendris ou écœurés. Mais les choses se gâtent quand sa mère noue sous ses yeux une romance avec John (John C. Reilly) : le Cyrus en apparence inoffensif laisse alors place à un personnage calculateur, impassible et pervers prêt à tout pour marquer son territoire et se débarrasser du nouveau prétendant. Tout en restant dans le registre comique qu’il maîtrise si bien, Jonah Hill approfondit le propos d’une comédie somme toute assez classique, en y ajoutant une touche de déviance grinçante parfaitement interprétée.
Bande-annonce - “Le Loup de Wall Street” (2013) de Martin Scorsese
3. Jonah Hill dans le rôle d'un trader improvisé et hyperactif
Un abandon de poste sur un coup de tête pour s’improviser trader, une prise de stupéfiants avec Leonardo DiCaprio, et une femme qui est aussi sa cousine… Dans cette scène légendaire du Loup de Wall Street, Jonah Hill incarne Donnie Azoff – inspiré par l’homme d’affaires Danny Porush –, qui rencontre alors, puis devient le bras droit de Norman Belfort (Leonardo DiCaprio), le président d’une société de courtage, et héros de cette histoire inspirée de faits réels de Martin Scorsese. Nous sommes à New York dans les années 90 et Donnie Azoff voit cette opportunité moins comme un travail respectable que comme une fantastique débandade à base de prises de coke répétitives et de lancers de nains à coups de canon. En fêtard de l’extrême au look banlieusard plouc chic, Jonah Hill livre l’une de ses meilleures performances, ce qui lui vaudra d’être nommé pour l’Oscar du meilleur second rôle en 2014, mais aussi un séjour à l’hôpital… Sur le tournage, les prises quotidiennes de vitamine D en poudre, la fausse cocaïne du cinéma, provoquèrent à Jonah Hill une grave bronchite de 3 semaines ; mais grâce à cette substance, l’acteur, comme il l’avoua a posteriori, était parfaitement en forme : “J’aurais pu soulever une voiture au-dessus de ma putain de tête !” Voilà qui aurait magnifiquement complété le tableau.
Bande-annonce - “True Story” (2015) Rupert Goold
4. Jonah Hill dans le rôle d'un journaliste fabulateur
Que se passe-t-il quand un journaliste légèrement fabulateur rencontre un sociopathe manipulateur ? Dans True Story de Rupert Goold, Jonah Hill incarne Michael Finkel, un reporter qui se fait renvoyer du prestigieux journal New York Times après s’être rendu coupable d’avoir déformé certains faits dans un de ses articles. Le journaliste déchu apprend alors qu’un présumé assassin a usurpé son identité à plusieurs reprises… Déformation professionnelle oblige, Michael Finkel décide de rencontrer cet homme du nom de Christian Longo, campé par James Franco, accusé d’avoir tué sa femme et ses trois enfants. Débute alors, au rythme doucereux du parloir d’une prison, une investigation perverse censée absoudre les deux hommes. Ironie du sort, c'est finalement par un bien plus grand mythomane que lui que le journaliste se fera duper. Si ce thriller psychologique est inspiré d'une histoire vraie, la vérité y est profondément changeante et malléable.
Bande-annonce - “Maniac” (2018) de Patrick Somerville
5. Jonah Hill dans le rôle d'un schizophrène en quête de guérison
Avec son avant-dernier rôle en date dans la série Maniac, Jonah Hill s'est approché au plus près du milieu de la psychanalyse – ou plutôt, des neurosciences. Dans cette comédie noire déjantée créée par Patrick Somerville, Jonah Hill incarne Owen Milgrim, un homme au fond du trou en proie à des troubles paranoïaques et schizophrènes… Grâce à sa participation à un mystérieux essai clinique supervisé par un super-ordinateur, le protagoniste vivra de multiples expériences bizarroïdes qui l’emmèneront aux confins de son subconscient, et l’aideront à explorer ses multiples personnalités. Un défi que relève habilement Jonah Hill, révélant ici l’étendue de ses pouvoirs d’acteur et apparaissant métamorphosé à l’écran aux côtés d’Emma Stone, qu’il retrouve 11 ans après SuperGrave. “Jonah [Hill] a une immense sagesse – qu'il a toujours eue, mais il est maintenant assez solide dans cette sagesse, son talent et sa loyauté,” commentait l’actrice à la première de Maniac. “C’est assez beau à voir.” Si son personnage est loin de témoigner d’un mental exemplaire, Jonah Hill, lui, fait preuve d’une maîtrise totale.