« La Nuit du chasseur n’est malheureusement pas le film génial espéré avec un tel scénario. (…) Déplorons encore quelques défaillances de la direction d’acteurs, quelques facilités et l’attendrissement final, odieux ». Tels sont les mots de François Truffaut, publiés dans la revue Arts en 1956, à propos du film de Charles Laughton. Si l’opinion du cinéaste français fut à l’époque abondamment relayée par la critique, le film a depuis été réhabilité et élevé au statut d’œuvre canonique du répertoire cinématographique. “L’un des plus beaux films fantastiques qu’il m’ait été donné de voir” selon la critique Catherine Salles, “œuvre à la fois déchiffrable et ineffable” pour Robert Benayoun des Dossiers du Cinéma, La Nuit du chasseur est aujourd’hui un film culte projeté sans relâche dans les écoles et un incontournable dans les vidéothèques des cinéphiles.
Contrairement au roman de Davis Grubb duquel il s’inspire, le film de Charles Laughton regorge de moments comiques qui participent à faire de La Nuit du chasseur un objet de cinéma hybride, à la frontière entre le thriller et la comédie. La photographie merveilleuse de Stanley Cortez, la vision intimiste de l’enfance, et la bascule constante du conscient à l’inconscient, font de cet univers un marasme d’angoisses oniriques unique en son genre. Située lors de la crise économique des années 30, avec un prêcheur comme incarnation du Mal, l’histoire est profondément ancrée dans le sol américain, sa culture religieuse et son spectre moral. C’est pourquoi il n’y a rien d’étonnant à ce que les studios Universal souhaitent s’en emparer, le film constituant aujourd’hui une part importante du patrimoine étatsunien.
Le projet de ce remake moderne est toutefois entouré de mystère. Si l’on sait que les studios ont engagé Matt Orton (Operation Finale) pour écrire le scénario, Peter Gethers et Amy Pascal (Ghostbusters, Spider-Man, Les Filles du Docteur March) pour la production, les acteurs restent inconnus. Selon un communiqué, la réécriture du film devrait suivre un tournant moderne, bien nécessaire pour convaincre les spectateurs contemporains.