La collection AMI automne-hiver 2016-2017.
En 2011, Alexandre Mattiussi lançait son label masculin AMI. Dès le début, il cultive sur les réseaux sociaux cette image du créateur accessible à tous qui séduit immédiatement. Très rapidement, ses créations intemporelles et décontractées sont distribuées chez les plus grands, Barneys, Le Bon Marché ou Corso Como. Numéro a rencontré ce créateur très sympathique.
Numéro : Cinq ans après la création d’AMI, vous avez déjà 300 de points de vente dans le monde, ainsi que cinq boutiques en nom propre, comment expliquez-vous ce succès ?
Alexandre Mattiussi : Nous développons une proposition stylistique originale. Elle s’articule sur l’idée d’un vestiaire avec des pièces reconduites de saison en saison. Même si j’ai des envies qui changent en matière de formes, de matières et de couleurs, il y toujours une ligne directrice, un fil rouge. La personnalité d’AMI, notre énergie positive et notre authenticité ont convaincu nos clients, et certains d’entre eux nous suivent depuis la première saison. Finalement, ce qui différencie deux chemises blanches en apparence identiques, ce sont l’image de la marque et ses valeurs.
Comment cultivez-vous justement votre authenticité ?
Aujourd'hui, nous recrutons les mannequins du défilé grâce à des castings sauvages. Il faut des profils particuliers, des vraies personnalités, de la réalité et de la diversité sur un podium. Au moment du show, nous déconstruisons complètement la collection pour recréer des looks sur les mannequins en fonction de leur personnalité et de leur caractère. Au départ, quand je dessine les modèles, même si je raconte une histoire globale, je conçois chaque pièce pour qu’elle vive par elle-même et que chacun puisse se l’approprier.
Vous liez beaucoup l’image d’AMI au style parisien, pensez-vous que ce soit un facteur de succès ?
À l’étranger, AMI reflète en effet quelque chose de très parisien avec une élégance nonchalante, et j’ai toujours insisté sur le fait que la marque était pensée et dessinée à Paris. Ça fait vingt ans que j'y habite et cette ville m’inspire et m’influence par son énergie unique et sa convivialité. Les terrasses, l’apéro, sortir ou faire son marché, c’est quelque chose de singulier qu’on ne trouve nulle part ailleurs.
Le rapport que l’on entretient avec le vêtement semble être important dans les valeurs d’AMI ?
Sous les paillettes et le glamour, la mode a avant tout une vocation commerciale. Dans la boutique, cette relation intime qui se crée entre le client et le vêtement est unique et n’existe pas sur un podium. Ma responsabilité de designer est de proposer des vêtements destinés à être réellement portés. Certains me racontent des souvenirs en rapport avec mes vêtements, un premier entretien, un mariage, un rendez-vous galant. Là, j’ai vraiment le sentiment d’avoir accompli ma mission.
Pour vous, la mode masculine est-elle différente de la mode féminine ?
Dans la mode masculine, le client est moins renseigné, et son approche du vêtement commence dans la cabine d’essayage. C’est pourquoi je ne crois pas à la mode conceptuelle, mais au prêt-à-porter. Pour l’homme, il faut conserver cette notion de vestiaire construit autour de pièces intemporelles. Finalement, je ne peux créer qu’en pensant que quelqu’un va porter le vêtement, l’aimer et se l’approprier. Pour la collection automne-hiver 2016-2017, j’ai eu envie de paillettes, mais traitées d’une façon très simple, poétique et surtout portable. En suivant ce thème de la nuit, la paillette s’imposait comme un élément essentiel, très parisien, avec un côté disco et jazzy.
Pourtant vous faites défiler de plus en plus de silhouettes féminines ?
Comme il y a beaucoup de filles autour de moi, inclure des silhouettes féminines lors des défilés s’est fait naturellement. Caroline de Maigret a été la première, puis, pour les collections suivantes, j’ai demandé à Audrey Marnay, Lolita Jacob ou Anna Cleveland de rejoindre le casting.
Mais AMI est avant tout une marque masculine. C’est juste la femme qui porte de l’homme. Pour le défilé automne-hiver 2016-2017, je voulais de l’oversize, exactement dans l’idée de mes copines qui piquent les fringues de leur mec, et surtout pas adapter les coupes.
Vous dites souvent être inspiré par vos amis et votre entourage. Comment se retrouve cette idée dans vos collections ?
Le point de départ d’une collection est toujours le défilé que je construis comme un petit film: dans quelle situation ai-je envie de voir évoluer cette bande d’amis, garçons et filles ? Mon inspiration vient finalement des histoires de la vie de tous les jours: la rue, l’aéroport, le café, le marché et même, pour mon dernier défilé, la nuit avec son lever de soleil. Une fois ce scénario mis en place, je crée la collection, puis je choisis le casting et la musique…
Photographe : Lonneke van der Palen. Réalisation : Camille-Joséphine Teisseire. Mannequin : Jean Lemersre chez Bananas Models. Coiffure : Taan Doan chez L’Atelier(68).
Maquillage : Laurence Maestrello chez Label Agence. Production : Florence Moll. Merci au Studio des Acacias