Little Simz - Venom | A COLORS SHOW
“Its a woman world so to speak / Pussy you sour / Never giving credit where its due cos you don’t like pussy in power”. Le flow est nerveux, mais toujours net et précis. Le débit est élastique. Sur son visage passe l’ombre d’un sourire. En mars 2019, la rappeuse britannique Little Simz s’invite pour la seconde fois dans le fameux studio berlinois Colors. Si l’émission est devenue un passage courant des musiciens et musiciennes de demain, rares sont ceux qui peuvent s’enorgueillir d’avoir joué plus d’une fois sur le fond de couleur uni. Vêtue d’un simple tee-shirt blanc, Little Simz assène vers après vers le texte de Venom, extrait de son troisième album, GREY Area.
Sa première apparition sur la scène rap britannique date de 2010. En trois ans, Little Simz sort quatre mixtapes, avant d’accélérer la cadence. Entre 2014 et 2015, la londonienne dévoile sept EPs qui déclenchent l’intérêt des plus grands. Mais elle ne se laisse pas impressionner. Son premier album, A Curious Tale of Trials + Person, sort paraît sur son propre label, AGE: 101 Music, malgré les offres généreuses de plusieurs grosses maisons de disques. La jeune femme s’attire ainsi le respect des plus grands. Tandis que l’Américain Kendrick Lamar loue Little Simz, “ l’une des meilleures rappeuses de sa génération”, Damon Albarn l’invite sur un titre de son groupe Gorillaz. En 2017, c’est elle qui assure les premières parties de la formation lors d’une tournée mondiale.
Little Simz - might bang, might not (Official Audio)
Si son agenda semblait déjà chargé, Simbiatu Abisola Abiola Ajikaw, de son vrai nom, ne consacre pas tout son temps à la musique. À la fois rappeuse et actrice, elle est une habituée des tournages : d’abord pour des séries produites par la BBC ou Channel 4, plus récemment pour Netflix, au sein de la série Top Boy, produite par Drake.
Originaire de la banlieue nord de Londres, Little Simz écrit ses premiers textes à 9 ans. Enfant des années 90, la jeune rappeuse cite volontiers Missy Elliott, Lauryn Hill et Nas parmi ses influences. À mi-chemin entre le chant et le rap, son style rappelle celui de ses contemporaines comme Flohio, rappeuse au flow incisif, également élevée dans les faubourgs de la capitale anglaise. À la question du sexisme dans l’industrie, les deux femmes sont unanimes. Peu importe qu’elles soient des femmes, du moment qu’elles ne sont pas réduites à leur genre.
“I am a one woman army”
Après la sortie de son dernier album en 2019, Little Simz occupait son temps sur les scènes du monde entier – en passant par la Seine Musicale lors du festival Afropunk en juillet de la même année. Le confinement mettant un terme à sa série de concerts, elle s’est retrouvée isolée seule chez elle en Angleterre. Un moment propice à l’introspection, mais aussi aux doutes, comme elle l’a fait savoir à ses fans dans un post Instagram publié en avril dernier. “Je me rends compte à quel point cette période d’isolation a impacté ma santé mentale” écrivait la jeune femme, avant d’ajouter : “Après beaucoup de procrastination, j’ai décidé d’arrêté d’être une petite conne qui chiale et de travailler sérieusement sur mon EP. J’ai fait le plein d’essence, je devais le faire, et je me sens bien.”
De ces doutes est né Drop 6, un court opus de cinq titres, réalisé en un mois. Le disque se présente comme un voyage introspectif, sans doute l’oeuvre la plus personnelle de la rappeuse. Après un départ sur les chapeaux de roue avec might bang, might not, l’EP glisse vers des productions plus minimales et un flow plus détendu, comme sur le dernier morceau, where’s my lighter. Tout au long du disque, Little Simz assène des déclarations puissantes et fermes telles que “I am a one woman army” ou “I got one life and I might just live it”, dans un processus de mise à nu totale.
Drop 6 [AGE 101 MUSIC], disponible.