Pour inaugurer le premier week-end du mois de juin, le festival We Love Green revenait en force avec une programmation impressionnante. Pendant deux jours, plus de cinquante artistes ont fait vibrer le bois de Vincennes, avec une affiche éclectique propice à satisfaire les goûts les plus divers. Petit tour d'horizon de cette 8e édition.
Malaises, chaleur et bousculades
Dès le samedi, le festival faisait un carton plein, ayant écoulé l'intégralité des places disponibles avec 40 000 visiteurs rassemblés sous la chaleur de ce premier week-end de juin. Dès 16 heures, la foule s’amassait vers la grande scène pour voir Aya Nakamura entonner ses tubes, culminant dans les charts français de ces deux dernières années. Après une après-midi rythmée par Metronomy, Columbine ou encore Rex Orange County, une foule surexcitée s’agitait autour de la petite scène où jouait le groupe de rap français 13 Block : pogos et bousculades étaient au rendez-vous sous une chaleur écrasante qui a été fatale à certains. Car, malgré les points d'eau prévus par les organisateurs, le flux permanent de festivaliers ainsi que la très faible présence de points ombragés ont provoqué de nombreux malaises et insolations durant le week-end.
Le spectacle envoûtant de la magicienne FKA twigs
En début de soirée, c'était au tour de Christine and the Queens d'illuminer la grande scène. Dans la douceur du crépuscule, la chanteuse rebaptisée “Chris” (titre aussi de son deuxième opus), accompagnée par sa troupe de danseurs, faisait vivre ses morceaux au rythme de chorégraphies remarquables, de lumières et de pyrotechnies. Mais la palme du spectacle revient sans doute à FKA twigs : sous le chapiteau bleu, l’artiste a enchanté le public avec un concert éblouissant. Voguing, danse du sabre, pole dance et, bien évidemment, chant : rien ne semble résister à l’Anglaise qui, tenue après tenue, nous convie dans un conte sensuel et mystique, entremêlant solennité et raffinement, laissant ses spectateurs éberlués. En fin de soirée, c'est une star d'un tout autre genre qui était attendue sur scène : Booba. Grosse déception : avec près de quarante minutes de retard, son spectacle presque intégralement en playback a laissé, pour sa part, le public très mitigé.
Le public parisien conquis par Rosalía
Le lendemain, une journée encore plus chaude attendait le public. Après le rappeur Vald sur la grande scène, c'est le prince français de l’électro pop, Flavien Berger, qui attirait une foule compacte de festivaliers. Dans un décor minimaliste, la grande scène laissait place à la soul planante de la pin-up colombiano-américaine Kali Uchis tandis que la rappeuse américaine Tierra Whack enflammait la scène de la Canopée. Ensuites, c’est la jeune prodige espagnole Rosalía qui réservait à We Love Green son tout premier concert à Paris très réussi. Très travaillée, sa performance où les influences flamenco croisent les codes de la pop et du R’n’B ne laissait aucun doute : la chanteuse a l’étoffe d’une superstar.
Erykah Badu et Tame Impala pour clore le week-end en beauté
Depuis longtemps, Erica Wright a renié son “nom d’esclave”, transformant l’orthographe de son prénom et préférant “Badu”, terme inspiré des “scats” de jazz – ces onomatopées qui remplacent les paroles lors des improvisations. Le terme, en arabe, signifie aussi “manifester la lumière et la vérité”. Son phrasé, proche de Billie Holiday, la pose comme la porte-parole de la révolution nu-soul initiée par D’Angelo à la fin des années 90. Pour We Love Green, la chanteuse de 48 ans a fait dans la sobriété : immenses dreadlocks sous un chapeau démesuré, imperméable beige oversize et bijou de nez. Apparaissant enfin avec un retard notable et une suite de bruitages étranges dignes d’un rite ancestral, la gourou met tout le monde d’accord avec une prestation ultra efficace à la croisée du jazz vocal et de la soul. Elle enchaîne les tubes, de Window Seat à Hello – en pensant sûrement à son ex-compagnon Andre 3000.
Lorsque les Australiens de Tame Impala investissent la scène de la Prairie avec près de trente minutes de retard, leur entrée est saluée par quelques sifflements énervés. Mais le groupe est rapidement pardonné. La foule chante et danse sur ses grands succès, de Let It Happen à The Less I Know the Better. Le groupe joue deux nouveaux titres à son public, Patience et Borderline, premiers aperçus d’un quatrième album très attendu après le succès de Currents (2015). Silhouette masquée par la fumée, Kevin Parker est à peine discernable dans les lumières et les confettis de ce show hypnotique et survolté qui clôt, en beauté, cette nouvelle édition de We Love Green.
We Love Green 2019, avec Mouton Cadet.