En 2014, c’était la surprise générale sur les écrans et les ondes hertziennes. Une fraîcheur du nom de Jungle, tout droit venue de Londres. Un funk efficace, une soul à la sensualité savoureuse et un phrasé haché qui donne l’envie monstrueuse de se déhancher sur la piste de danse. Une surprise visuelle, aussi, car c’est une meute de danseurs hip-hop en survêtement Adidas qui incarne cette musique. Au cœur du projet, Josh Lloyd-Watson et Tom McFarland. Voisins quand ils avaient 10 ans, ils ne se sont plus quittés depuis. Ensemble, ils s’essayent au chant, à la guitare, à la basse, au clavier et aux percussions. Jungle naît en 2013 et le duo sort un premier album éponyme l’année suivante. “Nous sommes comme des frères. Nous avons grandi ensemble et avons découvert les meilleures comme les pires facettes de chacun. Notre amitié nous permet d’avoir une totale honnêteté l’un envers l’autre. On ose plus facilement s’avouer en studio ‘C’est très mauvais’ sans que l’autre ne le prenne personnellement. De plus, nos différentes influences améliorent notre langage musical, Josh écoute davantage de hip-hop alors que j’ai plus d’intérêt pour le rock psychédélique.” confie Tom McFarland.
Jungle - “Platoon”
Le premier clip du duo, Platoon, sort en 2013. Dans la vidéo, une petite fille n’échappe pas au survêtement Adidas et effectue une chorégraphie avec une agilité folle. Regard face caméra, elle semble défier le spectateur et annonce par la même occasion la griffe Jungle. “Pour nous, danser était le moyen le plus facile d’exprimer visuellement notre musique.” explique Tom McFarland. À l’heure où les clips musicaux ressemblent de plus en plus à des courts-métrages, une chorégraphie filmée dans un lieu unique est devenue rare. Qu’il s’agisse de deux danseurs sur patins à roulettes dans un garage désaffecté (The Heat) ou d’une bande de jeunes dans un champ aux États-Unis (Heavy, California), Jungle utilise les codes de la comédie musicale. Dans le clip Time (2014), deux cinquantenaires – l’un noir et l’autre blanc – se lèvent de leur canapé pour swinguer ensemble sur la piste d’un gymnase. À la fin, ils se tiennent immobiles devant un étendard inscrit d’un simple mot : “Freedom”. “Pour moi, la liberté est un concept qui change constamment, qu’il s’agisse d’une liberté raciale, politique ou sexuelle... Cela représente beaucoup de choses pour différentes personnes. À l’image de notre nom de scène, “Jungle”, qui génère une certaine confusion, nous aimons que les gens puissent réfléchir et interpréter comme ils l’entendent.” se défend Tom McFarland.
Jungle - “House in LA”
Alors qu’il restait volontairement dans l’anonymat dans les clips de son premier opus, le duo se met en scène dans ceux de For Ever, son nouvel album. Rejoins par de nouveaux visages, Jungle dévoile une nouvelle image, celle d’un collectif, qui va de pair avec un désir de se livrer sans artifices. “Le premier album jouait davantage sur l’imaginaire, la fantaisie plutôt que la réalité. Ce nouvel album est plus authentique car nous y racontons des histoires de vie, des déceptions amoureuses que nous avons vécues ces dernières années… Josh et moi avons tous les deux perdu nos copines, on a un ami qui a été tué à Londres, j’ai perdu des membres de ma famille… Ça aurait été injuste de vivre ces expériences sans en parler dans notre musique.” confie Tom McFarland. Entre un flow R’n’B, le chœur cristallin d’Earth, Wind and Fire ou les sonorités électro de Chinese Man, Jungle conserve à la fois son irrémédiable soul – le duo cite d’ailleurs Jorja Smith parmi les nouveaux prodiges de la musique – et se renouvelle dans un album qui nous transporte, de la mélancolie d’une villa de Los Angeles luxuriante à la fièvre du samedi soir.
Jungle, For Ever [XL Recordings], disponible.