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11 Quand l'art s'invite sur les pochettes d’albums

Quand l'art s'invite sur les pochettes d’albums

MUSIQUE

Il y a, certes, cette célèbre banane, qui avant de devenir l'emblème controversé de Maurizio Cattelan, fut l’un des symboles de la collaboration entre Andy Warhol et The Velvet Underground. Mais ensuite ? Les collaborations entre artistes et musiciens font légion, et l’on ne compte plus le nombre de pochettes inspirées par des tableaux de David Hockney, ou encore par des sculptures d'Auguste Rodin. Et puis parfois, ce sont de vrais amitiés qui font naître une oeuvre nouvelle originale. Tour d’horizon des oeuvres d’art et des artistes qui ont inspiré les pochettes d’albums. 

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1. Andy Warhol et The Velvet Underground (1966)

 

Avant que l’artiste italien Maurizio Cattelan ne se la soit récemment appropriée, la banane a longtemps été l’apanage d’Andy Warhol dans le monde de l’art contemporain. S’il ne fallait retenir qu’une pochette d’album parmi toutes, imaginée par un artiste entre tous, le fruit jaune sur fond blanc resterait assurément dans les esprits. Dans les années 60, le groupe The Velvet Underground, mené par Lou Reed et John Cale, jouait souvent à la Factory, grand atelier de production inauguré par l'artiste à Manhattan. C’est ici que l’artiste aux perruques peroxydées leur présente la mannequin allemande Nico, incarnant la voix et la présence magnétiques qui manquent au groupe. Ni une, ni deux, The Velvet Underground and Nico, premier album de cette nouvelle formation, voit le jour en 1966. Oeuvrant à la production, Andy Warhol réalise également l’illustration du disque, une banane autocollante sérigraphiée depuis devenue culte. 

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2. Victor Vasarely et David Bowie (1969)

 

Parue en 1969, au même moment où l’Homme pose pour la première fois son pied sur la Lune, la chanson Space Oddity devient le premier grand succès de David Bowie. Son album du même nom voit le jour quelques mois plus tard mais peine à rencontrer le même succès, tant critique que commercial. Influencé par la folk de Bob Dylan et Simon & Garfunkel, tout en souhaitant tendre vers une pop orchestrale et futuriste, le disque se noie dans la difficulté du chanteur à faire des choix. Pour illustrer cette première odyssée spatiale – une constante dans l'oeuvre de Bowie –, il fait appel à son ami Calvin Mark Lee, qui choisit d’associer un portrait du chanteur capturé par Vernon Dewhurst avec une œuvre du peintre hongrois Victor Vasarely, figure des années 60-70 à l’origine du mouvement Op art et de l’art cinétique. Le visage du jeune David s’intègre ainsi à cette toile abstraite, composée de ronds dans un dégradé de bleu.

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3. Bridget Riley et Faust (1973)

 

À l’aube des années 70, le krautrock, ce rock un peu étrange et agressif venu des contrées allemandes, n’est encore qu’à ses balbutiements. Pourtant, dès 1973, le groupe Faust pose l’une des pierres les plus importantes de l’édifice avec The Faust Tapes, un album désordonné et chaotique à l’attitude résolument punk. Plus d’une vingtaine de titres défilent en à peine quarante-cinq minutes, du saxophone aux cris en passant par les lamentations, ou encore à un synthétiseur de plus en plus présent. Seul un fou chercherait à donner sens au capharnaüm incarné par ce troisième opus. Jouant avec l’ouïe comme avec la vue, le groupe passe commande à l’artiste Bridget Riley pour imaginer la pochette de l’album, un losange strié d'ondulations verticales hallucinatoires. Tout comme Victor Vasarely, la Britannique est l’une des figures de l’Op art, par ailleurs récompensée du Grand prix de la Biennale de Venise en 1968.

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4. Jeff Wall et UJ3RK5 (1980)

 

On connaît d’abord le Canadien Jeff Wall pour son travail de photographe-metteur en scène, mais rarement pour son rôle de claviériste discret. Polymorphe, l’artiste passe du studio à la scène en un claquement de doigt à l’aide de son groupe au nom imprononçable, UJ3RK5. Derrière son synthétiseur, il accompagne Rodney Graham (à la guitare) et Ian Wallace (à la basse), deux autres figures majeures de la scène photographique conceptuelle de Vancouver. C’est sans surprise que Jeff Wall réalise la pochette du disque UJ3RK5, sorti en 1980. En à peine quatre titres, le groupe y déploie ses expérimentations à la frontière entre le post-punk et la new wave. 

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5. Nan Goldin et Sous le manteau (2000)

 

300 : c’est le nombre (particulièrement bas) de copies du single Ici sur Terre de Sous le Manteau. De ce groupe, certains retiennent peut-être – ou pas – le morceau Derrière les rochers, en collaboration avec Zambla. Un tube obscur des années 90 où une voix avec un fort accent anglais clame son excitation face au “salopes en bikini et nibards à 20 000 dollars” d’Ibiza. Après le succès improbable du titre lors de l’été 1999, le collectif Sous le Manteau et Zambla envisage de produire un album entier. Ce dernier voit le jour en 2003, mais connaît un échec commercial suite à la faillite de son distributeur. Avant que l’aventure ne soit irrévocablement avortée, le collectif sort tout de même le single Ici sur Terre qui reprend les voix sensuelles, flirtant avec la parodie, du premier tube. Une photographie de l’artiste new-yorkaise Nan Goldin représentant deux amants en plein acte sexuel fait office de pochette – qui expliquerait peut-être le nombre réduit de copies, dû à la censure. 

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6. Takashi Murakami et Kanye West (2007)

 

Malgré sa mégalomanie peu dissimulée, le rappeur américain Kanye West ne s’affiche jamais sur les pochettes de ses propres disques. Pour illustrer ses deux premiers opus, The College Dropout et Late Registration, l’artiste choisit de se représenter à l’aide d’un énorme ours en peluche étrangement humanoïde. Son troisième disque, Graduation, ne déroge pas à la règle. Toutefois, cette fois-ci, c’est la superstar japonaise de l'art contemporain Takashi Murakami qui prête ses coups de pinceaux pour donner vie à un ourson enfin diplômé, propulsé dans le ciel violacé une fois son certificat en poche – un énimème personnage issu de son univers coloré, aussi enfantin que provocateur, jouant volontiers avec l'esthétique kawaii. L’univers futuriste de l’artiste nippon correspond tout à fait à l’ambiance électronique et expérimentale de ce troisième disque, qui comprend le célèbre sample de Daft Punk, Stronger (aujourd’hui encore, le titre le plus célèbre du rappeur). 

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7. Jeff Koons et Lady Gaga (2013)

 

Descendu par la critique lors de sa sortie en 2013, ARTPOP, le quatrième opus de Lady Gaga, reste à ce jour sa création la plus mal aimée. Pourtant, elle rencontre un important succès commercial, écoulé à 2,3 millions d’exemplaires de novembre à décembre 2013. Le ressentiment de la critique doublé du succès commercial écrasant n’est pas sans rappeler le parcours controversé d’une figure du pop art contemporain, directement citée dans le premier single de l'album, Applause : “One second I'm a Koons, then suddenly the Koons is me”, y clame la chanteuse. Fan de longue date de l’artiste américain, la pop star l’a même invité à concevoir la pochette de l’album. Inspiré à la fois par la Vénus de Botticelli et le mouvement cubiste, l’oeuvre comporte l’une des fameuses Gazing Balls de Jeff Koons : une sphère bleue en verre réfléchissant. 

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 8. Deana Lawson et Blood Orange (2016)

 

C’est une voix de femme qui introduit By Ourselves, le morceau liminaire de Freetown Sound, troisième album de Blood Orange – Devonté Hynes à la ville. Apres quelques vocalises s’ensuite un poème, écrit comme un coup de poing :  For Colored Women, de l’artiste Ashlee Haze. Pour illustrer les sonorités chaleureuses et sensuelles de ce troisième album, le producteur fait appel à la photographe afro-américaine Deana Lawson. C’est l’un de ses clichés qui fait office de pochette pour le disque. Intitulée Binky & Tony Forever, l'image réalisée en 2009 met en scène un jeune couple noir enlacé dans une chambre aux tons orangés. 

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9. Jean-Michel Basquiat et The Strokes (2020)

 

Si l’année 2020 est encore loin de toucher à sa fin, on peut déjà assurément nommer The New Abnormal comme l’un de ses albums majeurs. Marquant le retour fracassant des Strokes, groupe new-yorkais adoré dans le monde entier, le disque signe un retour au rock du début des années 2000. Entre les riffs de guitares sales et la voix rocailleuse de Julian Casablancas, le disque se distingue toutefois par son utilisation de synthétiseurs aux sonorités eighties. Une influence revendiquée jusque sur la pochette de l’album, empruntée directement à l’artiste américain Jean-Michel Basquiat. Elle reprend en effet le tableau Bird on Money, où un oiseau de profil se démarque sur un fond bleu baigné de signes “Peace & Love”.