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Numéro
05 Comment les artistes rendent hommage à George Floyd

Comment les artistes rendent hommage à George Floyd

Numéro art

Tué par un policier blanc lors de son arrestation à Minneapolis le 25 mai dernier, George Floyd est devenu un nouvel emblème de la lutte contre le racisme, les violences policières et le traitement injuste des personnes de couleur aux Etats-Unis, initiant un nouveau débat sur des réalités préoccupantes. Extrêmement relayée dans le monde entier, sa mort a par la suite donné lieu à de nombreuses manifestations et initiatives de soutien. Retour sur quelques uns des hommages rendus par des artistes à ce martyr érigé en héros.

En quelques heures, les images ont fait le tour du monde le 25 mai dernier. Celles d’un homme afro-américain, George Floyd, plaqué au sol par un policier blanc qui exerce sur son cou une forte pression avec son genou. “Je ne peux pas respirer”, dit l’homme, avant de perdre connaissance, sous les yeux de passants consternés. Le lendemain, les quatre policiers ayant procédé à son arrestation sont renvoyés et presque instantanément, la mort de George Floyd devient un nouvel emblème incontestable du combat contre le racisme et la violence des forces de l’ordre envers les personnes de couleur aux Etats-Unis. Des rassemblements s’organisent dans les cinquante états du pays mais aussi hors du territoire américain, pour manifester un élan de solidarité autant que défendre des droits encore trop souvent bafoués. Le portrait de George Floyd apparaît alors sur des pancartes brandies lors de ces événements, se diffuse en masse sur les réseaux sociaux et accompagne de nombreux hommages virtuels tandis que ses dernières paroles deviennent les mots forts de la lutte. Au sein de ce vent de révoltes, de nombreux artistes s’expriment et honorent la victime. Voici leurs hommages les plus bouleversants.

 

 

Les fresques murales : consécration d’un héros

 

 

Nelson Mandela, Barack Obama, Angela Davis, Martin Luther King ou encore Malcom X… de nombreuses personnalités érigées en symboles de la lutte pour les droit des personnes de couleur ont vu leur portrait peint en immense sur les murs de différentes villes. Depuis la préhistoire et les origines mêmes de la représentation, la fresque reste en effet l’une des manières les plus efficaces et respectées de consacrer des idoles, dieux, martyrs ou héros d’une civilisation. Il n’est donc guère surprenant que George Floyd ait fait très rapidement l’objet de ces mémoriaux urbains dans le monde entier. De Berlin à Nairobi en passant par Naples, Los Angeles et bien évidemment à Minneapolis, ville où il a été tué, son visage habille les briques, les toits, les rideaux en métal des boutiques ou les palissades. Car hors les murs des musées et accessible à tous, l’art dans l’espace public permet avant tout de transmettre un message direct, anonyme ou non. Celui-ci met au jour une réalité qui dérange mais sur laquelle personne ne peut désormais se permettre de fermer les yeux.

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Painting by Titus Kaphar for Time magazine. Courtesy Time. Painting by Titus Kaphar for Time magazine. Courtesy Time.
Painting by Titus Kaphar for Time magazine. Courtesy Time.

La puissante couverture du Time par Titus Kaphar

 

 

Créé en 1923, l’hebdomadaire d’information Time est certainement l’un des magazines les plus lus aux Etats-Unis. Aussi célèbres que son nom, ses couvertures encadrées d’un rouge écarlate sont le reflet souvent très éloquent des réalités de notre monde contemporain. A ce titre, le magazine consacre tous les ans une personnalité publique par le titre honorifique “Person of the year” et un portait en une. Hier, ce n’était pas l’image de George Floyd qui apparaissait en couverture du prochain numéro de Time mais celle d’une Afro-américaine peinte, les yeux fermés et la silhouette d’un enfant dans ses bras découpée, comme si celui-ci lui avait été brutalement enlevé. Le long de l’emblématique contour rouge de la une se lisent les noms de 35 hommes et et femmes, tous Noirs et tous tués par la police, jusqu'à se terminer par le nom de George Floyd. L’artiste américain Titus Kaphar est à l’origine de ce portrait pour le magazine, auquel il associe un texte sonnant comme un manifeste. “Serait-ce ridicule de garder espoir? Dois-je accepter que c’est cela que signifie être Noir en Amérique?”, y écrit-il en anglais. “Le deuil de la mère noire SERA commémoré. Cette fois-ci, je ne la laisserai pas s’en aller.” Prévue pour apparaître dans les kiosques américains dès le 15 juin prochain, cette couverture est déjà loin de passer inaperçue. Quant à la peinture d’origine, comme l’écrit l’artiste, elle ne sera délibérément pas à vendre.

<p>Jammie Holmes, “<em>They’re Going to Kill Me (New York City)”</em> (2020). Photo courtesy of the artist and Library Street Collective.</p>

Jammie Holmes, “They’re Going to Kill Me (New York City)” (2020). Photo courtesy of the artist and Library Street Collective.

<p>Jammie Holmes, “<em>My Neck Hurts (Dallas)”</em> (2020). Photo courtesy of the artist and Library Street Collective.</p>

Jammie Holmes, “My Neck Hurts (Dallas)” (2020). Photo courtesy of the artist and Library Street Collective.

Les banderoles dans le ciel de Jammie Holmes

 

 

Le matin du samedi 30 mai dernier, les habitants de cinq grandes villes américaines ont pu apercevoir dans le ciel d’un spectacle surprenant : le passage à travers les nuages d’un avion trainant derrière lui une banderole où des mots s’écrivaient en lettres majuscules. Ainsi, de New York pouvait-on lire “THEY’RE GOING TO KILL ME”, de Los Angeles “EVERYTHING HURTS” ou encore de Miami, “I CAN’T BREATHE”, citant tous les désormais tristement célèbres phrases prononcées par George Floyd avant sa mort. Connu principalement pour ses peintures du quotidien de familles Afro-américaines vivant dans le sud des Etats-Unis, l’artiste Jammie Holmes est ici sorti de son champ d’action habituel en investissant l’espace infini et visible de tous qu’est le ciel. Organisée avec le soutien de sa galerie Library Street Collective, cette œuvre performative exploitait ainsi un canal habituellement réservé à la publicité ou à des déclarations individuelles pour, là aussi, inciter la population à prendre conscience de l’urgence et à s’indigner pour rejoindre le combat. Pendant quelques minutes, chaque citoyen fut ainsi invité à tourner son regard vers les nuages, où l’âme de George Floyd pourrait bien s’être envolée.

Jammie Holmes, “Please I Can’t Breathe (Detroit)” (2020). Photo courtesy of the artist and Library Street Collective. Jammie Holmes, “Please I Can’t Breathe (Detroit)” (2020). Photo courtesy of the artist and Library Street Collective.
Jammie Holmes, “Please I Can’t Breathe (Detroit)” (2020). Photo courtesy of the artist and Library Street Collective.