Paysages anglais, situations grotesques et personnages ordinaires, humour et dérision… la touche de Martin Parr est reconnaissable entre mille. Le Fond régional pour l’art contemporain Bretagne à Rennes retrace les quarante années de travail du photographe britannique à travers l’exposition Parrathon : une rétrospective de Martin Parr. Organisée en partenariat avec Magnum Photos, dont Martin Parr est membre depuis 1994, la Fondation Martin Parr – qui promeut des photographes ayant travaillé sur l’archipel britannique – et l’agence de production Fovearts, l'exposition présente près de 500 images à travers 14 séries emblématiques, dont la très kitsch Self-Portraits (1991-2016) ou l’identitaire Think of England (1995-2003), faisant d'elle une rétrospective française considérable étendue sur plus de sept mois.
En bon narrateur omniscient, Martin Parr fait de ses photographies une fresque sociale. Tantôt bienveillant, tantôt acerbe, le photographe de 68 ans originaire de la banlieue sud de Londres fait de son objectif un miroir de la société et capture l’évolution des modes de consommation, des classes sociales et des aléas politiques, du milieu des années 1970 à aujourd’hui. Alors que les classes moyennes aisées servies par les années Thatcher sont mises à l’honneur dans la série The Cost of Living (1986-1989), le laborieux quotidien des classes ouvrières du Yorkshire est dépeint dans The Non-Conformists (1975), à la manière d’un documentaire. Avec la série The Last Resort, réalisée entre 1983 et 1985, le photographe évoque cette fois-ci davantage sa nostalgie des années 1960 et de ce qu’elles représentent pour la classe ouvrière : la fin du monde ouvrier et de ses valeurs ainsi que l’avènement d’une conception consumériste de la vie. À cet effet, ses clichés dressent le portrait de familles modestes en vacances à New Brighton, près de Liverpool, et montrent l’envers du décor de cette station balnéaire en déclin prenant des airs de zone industrielle.
Point d'ancrage du travail de Martin Parr, l’identité britannique est régulièrement dans ses prises de vue passée au crible. Nombre de ses séries, dont Think of England réalisée entre 1995 et 2003, témoignent de cette approche presque anthropologique à travers des clichés aussi bien cocasses que satiriques où, derrière les stéréotypes, pourrait bien parfois se cacher un regard moralisateur. Des stations balnéaires, aux ventes de charités en passant par les sandwiches au concombre, les fish’n’chips et les tasses de thé, tous les clichés sont au rendez-vous et relancent le débat sur ce que signifie “être anglais”. Spécifiquement pour cette série, Martin Parr se saisit d’un flash annulaire – originellement utilisé pour la photographie médicale – et réalise des clichés lumineux, colorés, d’une précision chirurgicale. Une esthétique contemporaine qui s’applique aussi bien à son travail documentaire et artistique, que dans ses collaborations avec le milieu de la mode. Martin Parr a en effet notamment immortalisé des séries mode pour Gucci et pour Numéro Homme.
Parrathon : une rétrospective de Martin Parr, jusqu’au 24 janvier 2021 au Frac Bretagne, Rennes.