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06 Yama Ndiaye, Prix Picto 2024, Alexandre Mattiussi, Interview

Prix Picto 2024 : Alexandre Mattiussi récompense les photographes de demain

PHOTOGRAPHIE

Ce mercredi 5 juin, dans la cour d'honneur du Palais Galliera, la fondation Picto a dévoilé les noms des quatre lauréats de la 26e édition de son prix annuel pour la photographie de mode. Découvrez le palmarès de cette année, commenté par Alexandre Mattiussi, président du jury 2024 et fondateur du label Ami.

  • Nataal © Yama Ndiaye.

  • Synthetic Dreams © Tamibé Bourdanné.

  • Journal © Gabriel Gomez.

  • Eufonia © Silvana Trevale.

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Yama Ndiaye : lauréate de l’édition 2024 du Grand Prix Picto de la Photographie de Mode

 

Ce mercredi 5 juin, dans la cour du Palais Galliera, ce sont quatre photographes qui ont reçu les prestigieuses récompenses décernées par le jury du prix Picto, fondé en 1998. Présidée par Alexandre Mattiussi, fondateur et directeur créatif du label Ami, cette 26e édition a récompensée Yama Ndiaye du Grand Prix Picto de la Photographie de Mode. Elle bénéficie ainsi d’un appareil photo Leica SL2-S, de la fabrication d’une exposition pour une valeur de 2000€ ainsi que d’une dotation de 500€ avec le soutien de la Saif. Née à Paris, cette photographe franco-sénégalaise a grandi entourée par la création, entre un père peintre et une mère plasticienne. À travers son art elle raconte une histoire intime et aborde des thèmes qui lui sont chers comme l’identité ou encore la mémoire. De son côté, le photographe Tamibé Bourdanné décroche la dotation 19M de la Photographie des Métiers d’Art, incluant une commande d’une valeur de 5 000€ réalisée pour le compte du 19M. L'artiste basé à Londres et originaire de Côte d'Ivoire s’intéresse à la manière dont la photographie documentaire souligne la beauté et la diversité des cultures africaines, en accordant une importance particulière aux interférences entre l’espace, la forme et les tonalités. Dans son projet Synthetic Dreams, récompensé cette année par le jury, on découvre des photographies influencées par la mode, à travers lesquelles l'artiste explore les rites et symboles du Bénin.  

 

Artiste reconnu - il a déjà remporté plusieurs prix comme celui de la meilleure œuvre conceptuelle au Fresh Eyes award Rotterdam en 2024 - Gabriel Gómez remporte quant à lui la dotation Filippo Roversi (qui comporte un tirage signé de Paolo Roversi ainsi qu'un prix de 1000 € d’aide à la réalisation auprès des services Picto). L’artiste conçoit son travail comme une sorte de thérapie et réalise des images aux tons clairs d’une grande douceur. Également attiré par les vêtements et les corps, il collabore depuis une dizaine d'années avec des marques vénézuéliennes pour lesquelles il réalise des campagnes lumineuses et délicates. De son côté travail de la photographe Silvane Trevale – lauréate du prix LGA Management / JANVIER – rend hommage au Venezuela, pays qui l’a vue grandir. Elle y explore le genre du portrait en photographiant quasi exclusivement des femmes et des enfants, documentant leur vie et les nombreuses traditions latino-américaines. Empreints d’une certaine nostalgie ses clichés n’en demeurent pas moins solaires, témoignant d’une persistance de la beauté au sein d’un pays traversé par de nombreuses crises.

 

Bénéficiant désormais d'une belle visibilité, ces quatre nouveaux lauréats rejoignent la liste émérite du prix Picto depuis 26 ans, dans laquelle on retrouve Charlotte Abramow, Sofia et MauroChristopher Barraja, ou encore Annabelle Foucher en 2023. Pour chacun d'entre eux, ce tremplin a contribué au développement d'une carrière notable dans le milieu très prisé de la photographie de mode.

Alexandre Mattiussi © Luc Braquet.

L’interview d’Alexandre Mattiussi, président du jury du prix Picto 2024

 

Numéro : En tant que fondateur et directeur créatif d'un label de mode, pourquoi est-ce important de participer à l'émergence de cette jeune génération d’artistes ?

Alexandre Mattiussi : Lorsque tu te présentes à un concours, tu espères toujours gagner. Tu donnes tout parce que tu as conscience que ton histoire peut changer du jour au lendemain. J’ai une immense passion pour la photographie parce que les collaborations entre les créateurs de mode et les photographes sont essentielles. C'est donc avec une joie immense que j’ai officié en tant que président du jury du prix Picto cette année. C'est un prix prestigieux qui a toujours récompensé des jeunes talents et c'était merveilleux de pouvoir les rencontrer et d'échanger avec eux.

 

Comment s'est déroulé le processus de sélection des finalistes ? 

Nous avons analysé les books de tous les finalistes avec ce jury extraordinaire, dans lequel figurait notamment Paolo Roversi. C’est un photographe que j'adore et avec lequel j'ai d’ailleurs eu la chance de collaborer à deux reprises. Faire partie d'un jury est merveilleux mais aussi assez difficile à endosser car à la fin, il faut faire un choix, ce qui est parfois difficile. C’est d’ailleurs pour cela que Picto décerne quatre prix en tout, qui récompensent des univers différents. Nous nous sommes réunis et nous avons parcouru les images ainsi que les vidéos de tous les finalistes, puis nous sommes passés au vote en discutant pour être sûrs que l’on remettait le bon prix aux bonnes personnes. 

 

Qu’est-ce qui vous plaît dans l’approche artistique de la photographe Yama Ndiaye, lauréate de cette édition 2024 ?

Yama Ndiaye, la grande gagnante de cette 26e édition du prix Picto est une photographe franco-sénégalaise. Elle a grandi entre Dakar et Toulouse, donc avec cette double culture, elle convoque dans son travail un souvenir, un héritage, une culture. Elle a fait un travail d'une beauté et d'une poésie assez forte tout en gardant un grand attrait pour la mode. À seulement 24 ans, elle a déjà développé une esthétique très singulière et désormais, en remportant le prix Picto, elle va pouvoir la faire connaître à des magazines et des créateurs de mode.

 

Qu’est-ce qui se dégage selon-vous des projets retenus cette année ?

La photographie de mode est extrêmement contextuelle. Elle répond à un climat social, politique, économique. Et ces photographes, qui sont pourtant de générations différentes, viennent documenter une certaine réalité de notre époque. En réaction à ce monde très complexe dans lequel nous vivons, j’observe dans leur travail beaucoup de poésie et d’intimité, et pas de violence. Je n'ai pas vu de choses agressives dans le travail des différents candidats. Au contraire, j’ai plutôt ressenti quelque chose d’extrêmement doux et d’assez optimiste.

 

Par rapport à d'autres prix qui récompensent la photographie, quelle est selon vous la particularité du prix Picto ? 

Le prix Picto a toujours été très noble et fédérateur et c'est un prix que l’on suit depuis longtemps. Je suis arrivé à Paris en 1998, l'année de création du prix Picto et j'étais déjà présent lors des premières éditions, lorsqu'en 2002, les lauréats étaient Sofia Sanchez & Mauro. C’est impressionnant de voir la trajectoire qu’ils ont eu depuis cette remise de prix.

 

Qu’est-ce qui vous a marqué en termes d’images récemment ? La découverte d’un jeune photographe ?

Comme beaucoup de gens à qui vous poseriez la question dans le milieu de la mode, je vous dirais que j’adore le travail de Robin Galiegue. C'est un photographe avec un talent extraordinaire, avec qui j'ai eu la chance de collaborer il y a quelques saisons. J'aime beaucoup quand, comme lui, des photographes de mode français arrivent à raconter une époque et transmettre un goût très précis.