“Est-ce que les touristes peuvent arrêter avec leurs capuccinos, leurs pizzas et leurs kebabs ?” s’emporte avec humour Massimo Bottura alors que l’Osteria Gucci dont il est responsable est inaugurée ce 9 janvier. Le meilleur chef au monde (selon le classement 2016 Fifty Best), 3 étoiles au Michelin avec son restaurant de Modène et star du premier épisode de la série Netflix “Chef’s table” a une toute autre ambition pour les visiteurs de la capitale de la Toscane. Associé à la maison Gucci, il promet l’essence de sa cuisine dans une série de petits plats à déguster tout au long de la journée, entre 20 et 30 euros : un risotto crémeux aux champignons, des tortellinis au Parmigiano Reggiano, mais aussi une brioche garnie de poitrine de porc, “le meilleur des hot-dogs ou des burgers”… Alors ?
… Alors, malgré les quelques dizaines de places seulement de l’Osteria Gucci, il ne sera pas nécessaire de réserver un an à l’avance, voire d’envoyer une lettre de motivation (expliquant au chef les raisons pour lesquelles on mérite une place dans son restaurant), contrairement à son Osteria Francescana de Modène. Au banc d’essai côté cuisine, le plat signature de Massimo Bottura : les torellinis au Parmigiano Reggiano affiné 36 mois. “Mon secret ? confie le chef, je crée la sauce au Parmigiano Reggiano avec de l'eau. L’eau, c’est la vérité. Si j’utilise de la crème ou du beurre, nous perdrions le véritable goût du produit. Un goût que j’ai gardé en mémoire depuis mon enfance et que j’ai voulu reproduire ici. Si vous voulez promouvoir une cuisine bonne et saine, vous devez rester très attentifs au gras que vous utilisez !” Le résultat séduira les amateurs de fromage et de légèreté.
“Mon secret ? Je crée la sauce au Parmigiano Reggiano avec de l’eau.”
Les tortellinis au Parmigiano Reggiano affiné 36 mois.
Installée dans un palais faisant face au célèbre Palazzo Vecchio, la Gucci Osteria tente aussi la fast food revisitée : burgers et buns. “Le plus important, explique Bottura, est l’équilibre entre le pain et la viande.” La brioche farcie à la poitrine de porc est une proposition du sous-chef Taka Kondo qui dirigera la cuisine à Florence. “La brioche buns est préparée dans un style chinois, commente Massimo Bottura, mais dans la bouche, le style est plutôt japonais, avec le goût du porc qui pénètre en profondeur dans la gorge.” C’est que la carte est une histoire collective : entrée réalisée par Ana Karime Lopez Kondo, dessert au chocolat imaginé en hommage au fils du chef.
“En tant qu’Italien, je suis d’une nature nostalgique, j’aime me tourner vers la cuisine traditionnelle. Mais je sais exercer un œil critique et la renouveler.”
“Mon fils me pose beaucoup de problèmes, s’amuse Bottura, mais il a une grande qualité : son amour du chocolat. Le dessert que nous proposons est constitué à partir de cacao du Venezuela, accompagné de glace, comme un Tiramisu. On y retrouve le goût du Nutella.” Mais sans l’huile de palme et les graisses saturées. Un chef-d’œuvre d’élégance, ni trop sucré ni trop gras. ” En tant qu’Italien, je suis d’une nature nostalgique, conclut le chef, j’aime me tourner vers le passé, vers la cuisine traditionnelle. Mais je sais exercer un œil critique et la renouveler pour créer de nouvelles traditions. Ici comme partout où nous intervenons, nous voulons proposer une expérience véritable de la cuisine, à partir d’ingrédients locaux, même si les inspirations viennent du monde entier.”
Et les inspirations viennent surtout de la culture et du monde de l’art et de la musique chez Massimo Bottura. À l’instar de son filet de morue dans son bouillon d’encre de calamar servi à Modène, nommé “Tribute to Thelonius Monk” par ce grand amateur de jazz détenteur de plus de 12 000 vinyles. Depuis l’ouverture en 1995 de l’Osteria Francescana, les lieux ont accueilli des œuvres de Maurizio Cattelan, Matthew Barney… Sa célèbre tarte au citron comme éclatée sur l’assiette (“Oups, j’ai fait tomber la tarte au citron”) est même un hommage à une œuvre de Ai Weiwei. Rien d’étonnant à ce que Massimo Bottura ait accepté l’invitation à Florence, au sein d’un palais du XIVe siècle réinventé par Alessandro Michele pour accueillir des œuvres issues de sa foisonnante créativité et des artistes du monde entier. Toute la vaisselle du restaurant elle-même, inspirée par le prolifique directeur artistique de Gucci, est d'ailleurs proposée à la vente.
Gucci Osteria par Massimo Bottura, de 12.00 à 20.30 sur réservation. Les galeries d’exposition du Gucci Garden sont ouvertes de 10h à 19h30.