1. Une exposition organisée du vivant du créateur
Alors que Paris rend un hommage appuyé à Azzedine Alaïa avec la rétrospective Je suis couturier dans ses ateliers du Marais, depuis le 10 mai, le Design Museum de Londres présente Azzedine Alaïa : The Couturier, une autre exposition consacrée au couturier subitement décédé le 18 novembre dernier. Mais si l'ancien directeur du Palais Galliera Olivier Saillard n’a eu que deux mois après le décès d’Azzedine Alaïa pour monter l’exposition parisienne, à Londres cela faisait déjà sept mois que Mark Wilson préparait la sienne. Et ce, en collaboration directe avec le couturier lui-même. A découvrir jusqu’au 7 octobre, l’exposition du Design Museum a été pensée, à l’origine, pour être vue du vivant d’Azzedine Alaïa. Plutôt que de retracer l’ensemble de son œuvre, elle met davantage l’accent sur la grande technicité du couturier et ses nombreux apports au monde de la mode révélés par les 11 thèmes de l'exposition : Exploring volume, Decoration and Structure ou encore Sculptural Tension. Avec Mark Wilson, conservateur au musée de Groningue aux Pays-Bas, c’est Azzedine Alaïa en personne qui a sélectionné la soixantaine de silhouettes a exposer mais aussi les designers invités. Les créations d’Alaïa ne sont pas les seuls objets exposés.
2. Le couturier sculpteur
Spécialement pour l’occasion, les designers Konstantin Grcic, Marc Newson, Ronan et Erwan Bouroullec, Kris Ruhs et Tatiana Trouvé ont créé des œuvres qui, intégrée à la scénographie dialoguent avec les robes sculpturales d'Azzedine Alaïa pour en offrir de nouveaux angles de lecture. Malgré un certain respect des traditions, Azzedine Alaïa avait le sens de l’innovation. En témoigne les ceintures corsets en cuir découpées au laser pour reproduire l’effet de la dentelle. S’il se définissait avant tout comme un couturier et non comme un styliste, c’est parce qu’il était l’un des derniers à coudre une robe de ses propres mains. Mais plus qu’un couturier, Azzedine Alaïa était un inventeur. Parmi ses créations, la robe bandage à capuche fait figure d’icône. En stretch immaculé, elle moule les formes du corps féminins et sculpte la figure d’une femme gigantesque. La sculpture, qu’il a étudié dans sa jeunesse aux Beaux-Arts de Tunis ne cessera jamais d’influencer ce virtuose de la coupe, en quête perpétuelle de perfection. Une robe pouvait prendre cinq semaines comme cinq années à être réalisée.
3. Alaïa au quotidien
Au Design Museum, les citations du couturier et les photographies de Richard Wentworth, qui l'a suivi au plus près pendant deux ans, parcourent les murs dépeignent un personnage humble et généreux. Dans sa célèbre cuisine, Azzedine Alaïa aimait convier ses amis autour d’un dîner qu'il avait lui même préparé. Esprit libre et indépendant, il présentait ses collections lorsqu’elles étaient prêtes, au mépris du calendrier des Fashion Weeks imposé par la Fédération de la Haute Couture et de la Mode. Ce qui ne l’empêchait pas d’être éminemment respecté par ses pairs comme par sa clientèle, composée de célébrités comme Naomi Campbell qui l’appelait “Papa”, Bonnie Tyler ou encore Rihanna. Première exposition entièrement consacrée à Azzedine Alaïa au Royaume-Uni, l’exposition du Design Museum n’a pas la même ambition que celle visible à Paris jusqu’au 10 juin. Mais elle aboutit au même constat: le style d’Alaïa est atemporel. Et c’est là une preuve supplémentaire de son génie.