“Heaven” de The Blaze
Les aficionados de danse avaient déjà repéré le prodige dans ses nombreuses apparitions qui témoignent de son engagement artistique. On se souvient notamment du clip Heaven de The Blaze, dont il est le protagoniste. Dans une de ces scènes de liesse forte en émotions contagieuses, dont le groupe électro français a fait sa signature, Kevin Bago berce un enfant puis court, tournoie, et se livre à différentes facéties au milieu d’un groupe d’amis sous le soleil, dans une nature édénique.
Il y démontre un vrai talent d’acteur, tant les nuances de sa sensibilité nourrissent ses mouvements plus proches, cette fois, de simples actes de la vie quotidienne que de la danse à proprement parler : “Au casting, on m’a demandé de passer par différentes émotions, de me mettre en colère et de pleurer, explique Kevin Bago. Comme je n’ai pas vraiment de formation d’acteur, c’est venu très naturellement, et je pense que les directeurs de casting ont senti que c’était plus réel que si je l’avais joué. Ensuite, nous avons tourné en Afrique du Sud. Guillaume et Jonathan m’ont dit qu’il ne fallait pas que le public voie que j’étais un danseur. Ils voulaient qu’on voie juste un mec qui kiffe avec ses potes et qui fume un joint. On a donc tout chorégraphié ensemble, jusqu'aux respirations, pour arriver à une impression de naturel total… Le fait qu'ils m'aient fait travailler comme ça m'a vraiment ouvert l'esprit sur un autre côté de la danse. C’était une expérience super enrichissante”.
#RunLoubiRun de Christian Louboutin, une performance signée Kevin Mischel.
En 2018, il prolongeait cette exploration aux côtés de l’acteur Kevin Mischel, rencontré précédemment sur le tournage de Divines – et qui a été d’abord connu en tant que danseur, avant de s’imposer au cinéma. Invité par la maison Christian Louboutin à imaginer une performance dansée avec sa nouvelle sneaker, la Red Runner, Kevin Mischel invitait son complice de longue date, le danseur Simhamed, et Kevin Bago, à collaborer avec lui. En quatre jours de répétitions intenses, les trois complices élaborent une performance où la danse hip-hop guide différentes variations d’énergies, et devient un langage vivant auquel se mêlent des mots, des attitudes et des gestes du quotidien. Plutôt qu’une chorégraphie rigide, la pièce laissait aux trois artistes une grande part de liberté et d’improvisation. Devant le public rassemblé à l’Oratoire du Louvre, église protestante réformée, le trio proposait une prestation absolument fascinante, toujours sur la brèche : “Kevin Mischel voulait vraiment qu’on crée ensemble, tous les trois. Le processus a été très fluide, on se comprenait totalement. Et pour moi qui suis croyant, c’était une expérience incroyable de danser dans une église. J’ai repensé à mes débuts… je n’avais jamais imaginé pensé que la danse m’amènerait là un jour.”
La campagne Balmain x Puma
En 2019, Kevin Bago a vécu un autre moment de retour sur soi assez intense, en participant à une performance de l’artiste canadien Miles Greenberg, au Palais de Tokyo : “Le projet incluait une vidéo et une performance en live. Miles avait rassemblé des performeurs noirs, et il nous a expliqué dès le début qu’il s’agissait d’évoquer ensemble la problématique du post-colonialisme, et de caricaturer la façon dont les Blancs occidentaux voient encore les Noirs. Nous étions statufiés, comme des sculptures posées sur un socle, puis Miles m’a demandé de faire un solo et d’évoluer au milieu des autres qui resteraient immobiles.”
À travers ses différentes expériences, Kevin Bago poursuit librement son exploration des différentes facettes du mouvement expressif, qui le mène aujourd’hui à se diriger plus volontiers vers des prestations incorporant du jeu d’acteur ou vers de la chorégraphie, comme il le fait pour la chanteuse Lous and the Yakuza, avec laquelle il évolue aussi en tant que danseur. Le chemin parcouru depuis ses débuts est édifiant : “Je ne savais pas du tout ce que je voulais faire à 17 ans, quand j’ai arrêté l’école. J’ai commencé à danser dans un groupe de tecktonic, on était vraiment bons, on a gagné des concours. Alors je me suis inscrit dans une école de danse où j’ai fait aussi bien du classique, du modern jazz, que des claquettes. En dehors, les après-midis, j’apprenais le hip-hop avec des amis, on dansait dehors, dans la rue, en espérant que le public veuille bien nous donner un peu d’argent. Mais très vite, j’ai été repéré puis engagé dans la compagnie de la chorégraphe Blanca Li… ce qui fait que je n’ai jamais fini ma formation.” Un destin tout tracé, dont on attend avec impatience les prochains épisodes.