Si une nation a inspiré certains des plus grands photographes du XXe siècle, il s'agit bien des États-Unis. Depuis la naissance de la photographie, le pays n’a cessé d’être le sujet d'artistes qui mettent en scène ses panoramas, ses populations, ses crises, mais aussi ses rêves et ses métamorphoses. Le fameux “American dream”, eldorado pour certains, immense désillusion pour d’autres, a amplement nourri les clichés de ceux qui souhaitaient montrer ses nombreux possibles, mais aussi ses échecs. Ce sont justement ces multiples facettes de l’Amérique, telles qu’elles furent documentées par les photographes, qui sont au centre de la nouvelle exposition de la Pace Gallery, dévoilée en ligne le 14 avril. À travers vingt clichés, elle nous invite dans les États-Unis de l’après-guerre jusqu’au XXIe siècle vu par d’éminents artistes, de Harry Callahan à William Eggleston, de Robert Frank à Carmen Winant, de Irving Penn à Paul Graham.
Introduite par une citation de l’écrivain Jack Kerouac évoquant avec poésie la diversité des paysages américains, l’exposition montre toute la richesse du territoire et de ses acteurs, mais aussi son vaste potentiel de transformation. Aussi y sont présentés plusieurs portraits de figures importantes de l’activisme qui incarnent les évolutions sociales, morales et politiques du pays : on retient par exemple l’un des clichés de l’artiste et militant David Wojnarowicz par Peter Hujar, et le portrait capturé par Richard Avedon d’Adam Clayton Powell Jr., pasteur et premier homme afro-américain à rejoindre le Congrès, où il occupa une position influente.
La déambulation dans les villes, le passage du temps et la subjectivité du regard des artistes sont également l’objet de plusieurs travaux, tels que ceux de Robert Frank parcourant les rues du New Jersey, d'Irving Penn arpentant celles de New York ou de Carmen Winant explorant, quant à elle, son propre désir en fragmentant son corps en plusieurs images. Un autre volet de l’exposition se concentre quant à lui sur une Amérique plus fantasmée à travers le mythe de l’Ouest américain. On y retrouve, entre autres, un parterre fleuri aux tonalités saturées photographiés par William Eggleston, ou encore une vue du grand canyon réalisée cette année par l’artiste Trevor Paglen, dont les couleurs surréalistes ont été obtenues par l’algorithme d’une machine.
Comme l’écrit Andria Hickey, curatrice en chef de la Pace Gallery :“En cette période, tout le monde cherche du réconfort, et nous croyons que l’art a le pouvoir d’apporter ce réconfort et de nous aider à analyser cette situation difficile ensemble.” En cela, l’exposition virtuelle de la Pace Gallery réussit à nous rappeler la force de ces artistes qui utilisent la caméra comme un outil, servant à documenter les réalités sociales inacceptables, à rendre visibles les invisibles, à briser les tabous des mœurs, à donner corps à son imaginaire et à subvertir le réel.
L'exposition virtuelle Diamonds on the Soles of Her Shoes. Notes on America est à visiter jusqu'au 28 avril sur le site de la Pace Gallery.