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Numéro
05 Paolo Roversi, Palais Galliera, exposition

Paolo Roversi raconte les coulisses de sa sublime exposition au Palais Galliera

Art

Le Palais Galliera consacre à l’immense photographe sa première exposition monographique à Paris. Au fil de 140 œuvres exceptionnelles, dont des inédites, le public est invité à parcourir cinquante années de travail d’un artiste à la sensibilité unique. Rencontre.

Molly Bair en Chanel haute couture pour Vogue Italia, 2015 © Paolo Roversi.

Depuis le 16 mars 2024, le Palais Galliera consacre à l’immense photographe sa première exposition monographique à Paris. Au fil de 140 œuvres exceptionnelles, dont certaines inédites, le public est invité à parcourir cinquante années de travail d’un artiste à la sensibilité unique. 

 

Un voyage émouvant parmi ses tirages Polaroid et des archives issues de ses collaborations avec de prestigieux magazines, dévoilant l’ascension d’un photographe au regard d’esthète, qui a su infuser, dans chacune de ses images, une grâce mélancolique et une poésie ayant permis à ses clichés de traverser le temps pour s’inscrire dans l’éternité.

 

 

Paolo Roversi s'expose au Palais Galliera 

 

Depuis son installation à Paris en 1973, Paolo Roversi a construit son œuvre, avec ou à travers la mode, en saisissant, sous le bruit, l’agitation et l’éphémère qui la caractérisent, une poésie et une mélancolie capables de s’inscrire durablement dans les mémoires. 

 

Dans son organisation même, l’exposition que lui consacre jusqu’au 14 juillet le Palais Galliera souligne cet engagement absolu de l’artiste envers une nécessité intérieure, une recherche personnelle du beau sans recette ni méthode. 

 

Entamée avant la pandémie et les bouleversements et retards qu’elle a entraînés, la préparation de cette monographie s’est ainsi longtemps cherché un titre, pour finalement ne pas en adopter. 

 

Elle aurait pu s’appeler Une histoire sans fil, commente Paolo Roversi, car à l’instar de mon travail, elle n’a pas de fil conducteur. La curatrice Sylvie Lécallier et moi avons passé en revue mes archives, nous avons pris le temps de discuter, et nous avons choisi un certain nombre d’images sans volonté de les classer chronologiquement.

  • Kirsten Owen en Romeo Gigli, Londres, 1987 © Paolo Roversi.

  • Kirsten Owen en Romeo Gigli, Londres, 1988 © Paolo Roversi.

  • Audrey Marnay en Comme des Garçons, Paris, 1996 © Paolo Roversi.

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Des photos de mode entre abstraction et poésie

 

Donner de l’espace aux émotions que suscitent les photographies, éviter de les étouffer par trop de pédagogie ou de narration : le cahier des charges que s’est donné Sylvie Lécallier permet de faire affleurer, sans la souligner, une spécificité de l’œuvre de Paolo Roversi. 

 

Mêler différentes époques de son travail met en évidence le caractère intemporel de ses photographies. Certaines pourraient avoir été prises au XIXe siècle, ou au contraire à l’époque contemporaine. Le fait que ses images ne soient pas datables est un véritable paradoxe dans le contexte de la mode.” 

 

La sensibilité de Paolo Roversi agit comme une sorte d’abstraction sur le présent qui se tient devant lui. Admirateur de la portraitiste du XIXe siècle Julia Margaret Cameron, qui a fixé pour l’éternité la beauté mélancolique de tant de visages féminins, mais aussi de Diane Arbus, qui a sublimé l’étrangeté et la vulnérabilité dans ses images en noir et blanc, Paolo Roversi a créé son propre monde, où l’urgence et l’hystérie de la mode s’effacent d’elles-mêmes. 

 

 

J’aime l’ambiguïté, et je marche sur une ligne qui sépare le masculin du féminin et la lumière de l’ombre, à la recherche de la beauté” Paolo Roversi

 

 

Dans son studio du XIVe arrondissement, il opère au rythme lent dicté par la chambre photographique grand format, et travaille très longtemps au Polaroid – avant de transposer son écriture à la photo numérique –, qui délave les couleurs et atténue les contrastes du noir et blanc. 

 

Alors que Richard Avedon et Irving Penn ont pratiqué avec une seule et même lumière devenue leur signature, Paolo Roversi réinvente sans cesse la sienne à partir de la boîte noire qu’est son studio, accueille les accidents et crée sa propre palette de couleurs picturales, détachées du réalisme. 

 

J’aime l’ambiguïté, et je marche sur une ligne qui sépare le masculin du féminin et la lumière de l’ombre, à la recherche de la beauté : je la touche, je la perds, je m’en approche et je m’en éloigne. À mes yeux, elle reste encore aujourd’hui mystérieuse, et c’est ce qui me plaît.” 

 

L’œuvre de Paolo Roversi, poète autant que photographe, reste elle-même fascinante et ineffable, tel un courant de vie traversant intact plusieurs décennies de l’industrie de la mode.

 

 

L'exposition Paolo Roversi, du 16 mars 2024 au 14 juillet 2024 au Palais Galliera, musée de la Mode de Paris. 10, Avenue Pierre Ier de Serbie, Paris 16e.

  • Anna Cleveland en Comme des Garçons, Tokyo, 2016 © Paolo Roversi.

  • Tami Williams en Christian Dior, Paris, 2016 © Paolo Roversi.

  • Sasha Robertson en Yohji Yamamoto, Paris, 1985 © Paolo Roversi.

  • Lucie de la Falaise, Paris, 1990 © Paolo Roversi.

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