© Photo/ Rebecca Fanuele
Il serait tentant de croire que les mois traversés ont conduit les artistes à tenter d'échapper au réel, mais il n'en semble rien. Au contraire, une forme de profondeur des esprits plus que des formes semble ça et là engagée, et ce fameux temps pour soi introspectif poursuit son chemin tout en se frottant aux grands enjeux de notre époque. Une ambiance à fleur de peau est sensible dans de nombreux projets du Haut Marais, tandis que pointe son nez un certain besoin de faire la fête qui, sans aller jusqu'à l'abandon, tente de coexister avec les enjeux sociétaux et sanitaires que nous traversons à grande échelle.
Pour son exposition chez Anne-Sarah Bénichou, Massinissa Selmani renforce progressivement la couleur de ses dessins qu'il fait désormais dialoguer avec des sculptures composées d'objets fabriqués, dessinés, sculptés et assemblés dans un esprit presque dada. Le cactus incarne arbitrairement le danger que peut représenter l'autre et accroît la tension que l'artiste empreinte aux événements historiques via les images de presse pour répandre l'absurde. Si l'autorité est renversée, la répression est toujours présente. L'absurde surgit comme pour vouloir nous faire prendre un peu de recul, peut-être pour mieux voir?
Cette même incitation à la résilience et la juxtaposition de l'esprit critique à l'objet parfois absurde, nous la retrouvons chez Backslash dans les oeuvres de Rero, dont les supports et les formes infinies sont liées par l'usage systématique de la typo Verdana barrée qui jette des slogans comme autant d'incitations à l'exercice de l'esprit critique, sorte de commentaire politique à trois bandes. Un mur de typo-escalade, un bolide cycliste devenu trophée, un drapeau qui dénonce le procès en non-essentialisme qui a frappé la culture ces derniers mois, font partie des composantes curieuses et suspectes du slogan qui alerte le collectif sur une urgence à réfléchir.
Mais le sens de la fête revient et c'est à la galerie Miranda qu'on le retrouve, avec une exposition-dialogue entre les pratiques photographiques de Philippe Chancel et de Gary Green. Ces séries argentiques en noir et blanc rarement montrées témoignent d'une sensualité et d'une désinvolture assez rock qui font rêver aujourd'hui. Un dialogue transatlantique ou tout semblait alors possible. Un enseignement pour apprendre à s'amuser de nouveau? La playlist du DJ Jean de Lardemelle et une belle sélection de livres accompagnent cette exposition à cette intention.
Cependant, il ne faudra pas manquer le fascinant dialogue construit sur la poésie du langage et les pirouettes formelles de l'oeuvre redécouverte de Daniel Pommereulle que la galerie Christophe Gaillard fait dialoguer avec ses contemporains dont Rebecca Horn, Hervé Télémaque, Wols et tant d'autres, ni l'exposition d'Hubert Renard à la galerie mfc-Michèle Didier présentée à l'occasion de la publication Hubert Renard – Catalogue raisonné, 1969-1998.
La nouvelle édition du Paris Gallery Week-end aura lieu du 3 au 6 juin 2021 dans les galeries parisiennes.