Bill Skarsgård est diabolique. Disons surtout que le jeune Suédois de 29 ans aime incarner les rôles les plus pervers. L’acteur s’est fait connaître du public international avec son personnage de vampire dans la série Netflix Hemlock Grove. Mais c’est avec son interprétation du clown tueur d’enfants dans les films Ça (2017) et Ça II (sorti en septembre) que sa cote explose à Hollywood. Il s’en amuse en interview lorsqu’il résume ses pensées sur le tournage : “Il y avait quelque chose de très étrange à me dire que mon jeu d’acteur serait jugé à l’aune de ma capacité à traumatiser les enfants, sur le plateau et dans les cinémas.”
“On dirait que les portraits de Francis Bacon sont paralysés dans un état permanent de désespoir…”
Bill Skarsgård semblait tout indiqué pour réinterpréter les figures tourmentées des toiles de Francis Bacon dans l’hommage que nous souhaitions rendre à l’artiste britannique. Son visage taillé à la serpe, ses yeux bleu glacé et glaçant et, surtout, sa faculté à exprimer pulsions et intériorité psychique dans le moindre rictus faisait de lui le candidat idéal pour cet exercice de style. Fils de l’acteur suédois Stellan Skarsgård (acteur chez Lars von Trier aussi bien que dans la saga Avengers et le prochain Dune de Denis Villeneuve), issu d’une fratrie de huit enfants – dont quatre sont aussi acteurs, Bill Skarsgård a naturellement commencé à tourner à l’âge de 9 ans. Rien ne semble donc l’effrayer dans un milieu du cinéma dont il se met volontairement en retrait.
“J’ai tendance à aimer les thrillers psychologiques. Répulsion et Rosemary’s Baby de Polanski, Shining de Kubrick…”
Pour jouer le rôle du clown tueur Pennywise dans la nouvelle adaptation du roman de Stephen King (après les deux téléfilms cultes des années 90), la nouvelle coqueluche de Hollywood explique avoir dû s’adapter à un personnage particulièrement abstrait : “Il n’est pas humain, et cela a rendu le jeu plus facile d’un certain côté. Cela aurait été plus difficile pour moi de jouer un véritable être humain psychopathe.” Cette humanité, il ira plutôt la puiser pour répondres aux attentes du photographe Tim Richardson, mêlant pour Numéro art prises de vue réelles et images digitales.
Numéro : Quand avez-vous fait vos débuts comme acteur ? Quel était votre premier film ?
Bill Skarsgård : Mon premier rôle était celui du petit frère d’Alex dans le film suédois Järnganget. J’avais 9 ans à l’époque.
Qu’avez-vous trouvé le plus difficile dans l’interprétation de Pennywise dans Ça et Ça 2 ?
Rendre justice à ce personnage culte de Stephen King, tout en essayant de réinventer ce que Tim Curry avait déjà si bien réussi.
Quels sont vos films d’horreur préférés, et pourquoi ?
J’ai tendance à aimer les thrillers psychologiques. Répulsion et Rosemary’s Baby de Polanski, Shining de Kubrick… Et, histoire de ne pas passer pour un bouffon prétentieux, L’Heure du loup de Bergman.
Quels genres d’états et de sentiments souhaitiez-vous dégager en interprétant un personnage de Francis Bacon ?
On dirait que ses portraits sont paralysés dans cet état permanent de désespoir, ou peut-être de vérité. Mais j’ai principalement suivi les directives du photographe Tim Richardson.
Que préférez-vous dans les peintures de Francis Bacon ?
De ses peintures émane une vérité émotionnelle. Il ne représente pas la façon dont on est perçu physiquement, mais comment l’on se sent vraiment de l’intérieur. Et le soi intérieur de Francis se révèle lui aussi sur la toile. Comment tu te sentais Francis ? Tout va bien ?
Vous intéressez-vous à l’art ? Qui sont vos artistes préférés ?
Je ne dirais pas que je m’intéresse particulièrement à l’art, mais je l’apprécie. J’adore P.S. Krøyer : personne n’a su capturer la Scandinavie de façon aussi idyllique.
Qu’est-ce qui vous manque le plus en Suède quand vous êtes loin ?
Ma famille et mes amis. Ils habitent tous à Stockholm, c’est pourquoi je ne peux pas la quitter trop longtemps.
Quels sont vos futurs projets ?
Je joue Willard dans le nouveau film d’Antonio Campo, The Devil All the Time, qui sortira l’année prochaine. Je joue aussi Dane dans le premier film de Chase Palmer, Naked Singularity, ainsi que Kane dans le premier film d’Edson Oda, 9 Days.
Bacon en toutes lettres, jusqu’au 20 janvier 2020, Centre Pompidou.