Au 9 avenue Hoche à Paris, la foire Asian Now prend cette année des airs de rassemblements de la Sillicon Valley. Curatrice adjointe au Musée Guggenheim à New York, Xiaorui Zhu-Nowell propose au premier niveau une sélection d’œuvres, pour beaucoup interactives, qui invitent à s’essayer à la réalité virtuelle ou à se plonger dans les méandres du web. L’artiste Liu Wa, par exemple, propose de faire l’expérience de ses grandes fresques murales à l’aide d’un casque à ondes cérébrales. Une fois installée sur la tête, l’interface fait évoluer la lumière de l’espace selon votre état d’anxiété et de concentration. Trop de bruit, impossible de se focaliser sur l’œuvre… et la lumière vire au rouge rendant d’autant plus visibles certains détails de la peinture, et en obscurcissant d’autres. Calme absolu, relaxation intense… et le vert domine désormais dans la pièce.
L’artiste Liu Wa, par exemple, propose de faire l’expérience de ses grandes fresques murales à l’aide d’un casque à ondes cérébrales.
À quelques mètres, le casque virtuel du projet Suus Oculis Meis plonge le visiteur dans une série d’environnements immersifs : comme un poisson sous l’eau, ou comme un lilliputien sur une table à manger. Pour Michael Xufu Wang qui a curaté le projet, il s’agit “de faire l’expérience de différentes réalités de points de vue divers, et à des échelles radicalement différentes. Notre vision du monde est déterminée par notre taille, et par le lieu d’où on le regarde. La réalité virtuelle permet d’observer ce monde autrement, et de réaliser que ce que nous prenons pour la réalité n’est qu’une construction singulièrement humaine.”
L’installation de Hsiao Li-chi est plus ostensiblement politique. À l’heure où la reconnaissance faciale devient un instrument de contrôle des populations en Chine, l’artiste a élaboré un système qui enregistre le visage de chaque visiteur pour lui assigner un code. Libre à chacun d’accepter sur le site internet du projet d’accepter que son visage soit partagé ou privé. Sur la foire, la liste de codes anonymes continue encore et encore à s’imprimer et à se déverser sur le sol...
Hsiao Li-chi a élaboré un système qui enregistre le visage de chaque visiteur pour lui assigner un code.
“On me demande souvent comment les artistes d’aujourd’hui intègrent les nouvelles technologies dans leur travail”, souligne la curatrice Xiaorui Zhu-Nowell. “Mais la jeune génération d’artistes que nous présentons est née avec les nouvelles technologies. Contrairement aux artistes des années 60 qui ont du incorporer la vidéo naissance dans leur travail, ou aux artistes des années 90 et 2000 qui ont intégré les possibilités numériques, cette génération est née avec Internet, elle utilisait Photoshop avant même d’être artiste. Les nouveaux médias sont ancrés dans leur quotidien et ne sont pas « nouveaux » à leurs yeux. A travers cette plate-forme que j’ai souhaité intituler In Real Life, je souhaitais aussi que le public sorte de la fascination romantique pour la technologie. Certes, l’aspect innovant est fascinant, mais les conséquences politiques, philosophiques et sociétales ne sont pas à négliger.”
L’artiste hong-kongaise Wong Kit Wi s’intéresse ainsi à la notion d’immortalité alors que le transhumanisme, par exemple, vise une vie éternelle en uploadant la conscience humaine sur ordinateur. « Que veut-dire être ami pour la vie, se marier pour la vie si cette notion de vie est bouleversé par les nouvelles technologies », s’interroge Xiaorui Zhu-Nowell.
ASIA NOW, Paris Asian Art Fair, du 16 au 20 octobre au 9 avenue Hoche, Paris 8e.
Samedi 19 octobre, la foire propose deux DJ sets : PROXI de 19h à 20h et ShuShu de 21h à 22h.